Résumé de la 6e partie n Le roi accourut auprès de la crasseuse malade ; il se mit à ses pieds, et lui jura qu'elle n'avait qu'à prescrire une punition proportionnée à la faute de Gracieuse. Quand ses épaules furent découvertes, ces cruelles mégères ne pouvaient soutenir l'éclat de leur blancheur ; elles fermaient les yeux comme si elles eussent regardé longtemps de la neige. – Allons, allons, courage, criait l'impitoyable Grognon du fond de son lit ; qu'on me l'écorche, et qu'il ne lui reste pas un petit morceau de cette peau blanche qu'elle croit si belle. En toute autre détresse, Gracieuse aurait souhaité le beau Percinet ; mais se voyant presque nue, elle était trop modeste pour vouloir que ce prince en fût témoin, et elle se préparait à tout souffrir comme un pauvre mouton. Les quatre furies tenaient chacune une poignée de verges épouvantables ; elles avaient encore de gros balais pour en prendre de nouvelles, de sorte qu'elles l'assommaient sans quartier ; et à chaque coup la Grognon disait : – Plus fort, plus fort, vous l'épargnez. Il n'y a personne qui ne croie, après cela, que la princesse était écorchée depuis la tête jusqu'aux pieds : l'on se trompe toutefois, car le galant Percinet avait fasciné les yeux de ces femmes : elles pensaient avoir des verges à la main, c'étaient des plumes de mille couleurs ; et dès qu'elles commencèrent, Gracieuse les vit et cessa d'avoir peur, disant tout bas : – Ah ! Percinet, vous m'êtes venu secourir bien généreusement ! Qu'aurais-je fait sans vous ? Les fouetteuses se lassèrent tant qu'elles ne pouvaient plus remuer les bras ; elles la tamponnèrent dans ses habits, et la mirent dehors avec mille injures. Elle revint dans sa chambre, feignant d'être bien malade ; elle se mit au lit, et commanda qu'il ne restât auprès d'elle que sa nourrice, à qui elle conta toute son aventure. À force de conter elle s'endormit : la nourrice s'en alla ; et en se réveillant elle vit dans un petit coin le page vert, qui n'osait par respect s'approcher. Elle lui dit qu'elle n'oublierait de sa vie les obligations qu'elle lui avait ; qu'elle le conjurait de ne pas l'abandonner à la fureur de son ennemie, et de vouloir se retirer, parce qu'on lui avait toujours dit qu'il ne fallait pas demeurer seule avec les garçons. Il répliqua qu'elle pouvait remarquer avec quel respect il en usait ; qu'il était bien juste, puisqu'elle était sa maîtresse, qu'il lui obéît en toutes choses, même aux dépens de sa propre satisfaction. Là-dessus il la quitta, après lui avoir conseillé de feindre d'être malade du mauvais traitement qu'elle avait reçu. A suivre Marie Catherine, comtesse d'Aulnoy