Le documentaire «Vivre avec son œil», un portrait intimiste sur le photographe de guerre Marc Garanger, témoin des atrocités durant la guerre d'Algérie, a été projeté mercredi à Alger. En compétition au 8e Festival international du cinéma d'Alger (Fica), dédié au film engagé, «Vivre avec son œil» donne la parole à Marc Garanger qui, dans les années 1960, alors appelé de l'armée française pendant la guerre d'Algérie, s'est insurgé contre sa hiérarchie en refusant des portraits d'Algériennes dévoilées, destinés à des photos d'identité. Réalisé par Naïs Van Laer, ce documentaire de 59 mn consacre une grande partie à la guerre de Libération, vue par le regard de ce photographe qui a été incorporé de force dans les forces armées de son pays, engagées dans la guerre en Algérie. Alternant des témoignages et des images de Marc Garanger, engagé en tant que photographe de régiment à Sour El Ghozlane (Bouira), le documentaire porte un regard «émouvant» sur la guerre de Libération (1954-1960), période où ce photographe de 80 ans n'avait que 25 ans. Des photographies troublantes en noir et blanc, témoignant de la violence et des tortures terribles durant la guerre d'Algérie, les exécutions sommaires des prisonniers (corvée de bois) jusqu'aux rituels chamaniques des peuples autochtones de Sibérie, le documentaire dépeint le portrait d'un photographe sensible qui a immortalisé des crimes de guerre, en Algérie notamment. Présent à la projection, Marc Garanger a qualifié de «viol symbolique» le fait de photographier des femmes forcées à se dévoiler pour des photos d'identité. «Il n'y a aucune violence de ma part, mais c'était la situation qui était violente», s'est défendu le photographe, qui se dit être pris au piège de l'armée française, qui n'a jamais réclamé, a-t-il poursuivi, les «négatifs» des portraits de femmes qu'il a photographiées. Egalement cinéaste, Marc Garanger, qui répondait à une question d'un journaliste lors des débats, a dit que ses «images témoignent de crimes commis par l'armée coloniale en Algérie». De son côté, la réalisatrice a précisé que les photos des essais nucléaires français à Reggane (Adrar) dans les années 1960 que Garanger a réalisées n'ont pas été retrouvées dans les archives de l'armée française. Ces photos, a-t-elle souhaité, auraient pu être exploitées dans son documentaire, réalisé au terme de 3 années d'écriture et de tournage.