Résumé de la 1re partie Un matin de janvier 1936 Sergueï Bakinski, en se réveillant, découvre que la mer Caspienne est complètement gelée. Une semaine plus tard, l'extraordinaire émigration est terminée. La population de plusieurs villages de pêcheurs a démonté ses cabanes de bois et transporté le tout à pied à dix-huit kilomètres au large : là, enfin, s'arrête la banquise. lIs sont à peu près deux mille hommes, femmes et enfants, qui émigrent ainsi sur la glace ! Avec, bien entendu, leurs 420 kilos de caviar en tonneaux, sévèrement surveillés par Sergueï Bakinski. Pendant deux semaines, tant bien que mal, les hommes pêchent, au bord de la glace, puisque leurs bateaux sont prisonniers dix-huit kilomètres en arrière. Et ils vivent comme ils le peuvent, dans leurs cabanes reconstruites plutôt mal que bien. Et puis, un matin de février, l'un des pêcheurs vient dire à Sergueï : «Il y a deux choses ennuyeuses : la première c'est que la mer devient mauvaise. Il est impossible de pêcher depuis le bord de la glace, on tomberait à l'eau.» Sergueï hoche la tête en signe d'approbation. «La deuxième c'est que le soleil se lève à l'ouest, et ça, tu vois, ce n'est pas normal du tout !...» Alors là Sergueï fait un bond, car il a compris. Comme il est bien évident que ce n'est pas le soleil qui a décidé, tout seul, de se lever à l'ouest, cela veut dire que pendant la nuit, tout ce qui les entoure a pivoté de 180 degrés : une seule explication est possible. La banquise s'est détachée de la côte et ils sont en train de dériver ! Des éclaireurs à pied reviennent bientôt en confirmant la nouvelle : deux mille personnes dérivent sur la mer Caspienne, sur un morceau de banquise d'environ 3 kilomètres de long et un peu moins de large. Il faut que la glace soit épaisse pour les supporter, mais cela ne durera pas ! Et désormais, la mer étant gelée, il est impossible de pêcher depuis le bord de cette île de glace devenue le plus énorme radeau de la Méduse qu'on ait jamais vu : deux mille personnes avec femmes, enfants et vieillards, le tout mourant de faim. Cette fois, les principaux chefs des communautés entourent Sergueï Bakinski, avec un regard sans équivoque vers les douze tonneaux. Sergueï, les regarde, puis regarde à son tour les tonneaux et dit sombrement : «Tant pis. Entamez le caviar, mais que l'on serve d'abord les femmes et les enfants en bas âge !» Mais au moment où la foule des naufragés affamés va se précipiter vers cette nourriture de luxe, quelqu'un crie : «Des avions !» Effectivement, les secours arrivent. Exactement comme si Sergueï Bakinski avait dit : «Commençons le caviar, ça les fera venir...» Immédiatement, et sous ses ordres, des hommes balisent sur la glace une piste de fortune, et le pont aérien s'organise. Mais il faudra deux semaines avec les avions légers de l'époque, pour évacuer les deux mille affamés à la dérive au milieu de la mer Caspienne ! (à suivre...)