Présentation Le film nous montre des lieux, ceux de La Casbah, et des gens qui ont occupé ces lieux de mémoire. La cinémathèque algérienne a organisé, mercredi, une rencontre-débat autour de la production du film documentaire El-Gosto, dont le sujet se rapporte à l?histoire du genre musical chaâbi, et ce en présence de la réalisatrice Safinez Bousbia. La rencontre a été enrichie ? et soutenue ? par la projection d?un film présentant le projet que Safinez Bousbia entreprend de réaliser. «Ce film n?est pas le documentaire lui-même», précise-t-elle. «Ce n?est que l?idée du projet pour le promouvoir et soutenir mon entreprise auprès des partenaires financiers», ajoute-t-elle. Le film projeté et qui n?est donc qu?un aperçu de cette vaste action culturelle, raconte la rencontre d?anciens musiciens du chaâbi ayant marqué leur époque, celle des années 1940 jusqu?aux années 1970. Le film nous montre des lieux, ceux de La Casbah, et des gens qui ont occupé ces lieux de mémoire. Des lieux et des gens oubliés, cependant. Oubliés de tous, et surtout de la plupart des Algérois (en particulier les jeunes générations), devenant ainsi les oubliés de l?art, de l?histoire, de l?Algérie. Ces artistes, qui se sont voués au chaâbi, qui lui ont donné ses lettres de noblesse, déplorent la situation dans laquelle ils se trouvent : dénuement moral et matériel. «L?initiative est excellente», déclarent Ahmed El-Barnaoui, Mohamed Laâgab et El-Hadi El-Anka présents à la rencontre. «Car cela a permis aux anciens musiciens du chaâbi de se revoir après trente années de séparation, mais cela permet aussi de faire connaître le chaâbi, son origine et ses pionniers.» El-Gosto n?est pas seulement un film sur des hommes et des lieux, il est également un retour ? nostalgique ? sur les traces du chaâbi, notamment sur ceux qui l?ont impulsé et rendu populaire, en l?insérant dans le patrimoine culturel algérien. Le chaâbi d?antan tel qu?il était pratiqué, et le chaâbi d?aujourd?hui, tel qu?il est présenté, ne sont certainement pas les mêmes. Un fossé les sépare. «C?est vrai que le chaâbi a changé», disent-ils, ajoutant que «pour vivre, la musique doit avoir un environnement social et culturel.» Le chaâbi est d?abord une fresque : c?est une pratique, un rituel, une musique s?inscrivant dans un contexte culturel bien déterminé. De l?ancien chaâbi ne subsiste, aujourd?hui, que la mélodie. Tout a disparu, s?est effiloché au fil des ans. El-Gosto se veut également une prise de conscience, c?est-à-dire un appel lancé aux compétences concernées en vue de considérer le chaâbi (et la culture musicale en général) dans un discours de préservation, et donc l?urgence de réhabiliter les anciens musiciens du chaâbi encore vivants afin de léguer leur savoir aux jeunes générations, car il est en déperdition. La problématique d?El-Gosto est de savoir s?il y a vraiment une relève après ceux qui étaient les disciples du maître El-Hadj M?hamed El-Anka. «Il y a une relève, timide certes, mais elle existe, il suffit seulement de l?encourager et de lui créer une environnement favorable à son accomplissement», Mais tous s?accordent à dire qu?entre l?ancienne et la nouvelle génération, il y a une différence. «Les chanteurs de chaâbi sont des artistes, l?art est inné chez eux, mais ils sont loin d?être des professionnels», souligne El-Hadi El- Anka. Quant à Safinez Bousbia, elle lance un appel aux sponsors sollicitant leur aide pour venir soutenir financièrement la réalisation de la deuxième partie de son film. «La première partie était un autofinancement, et il se trouve que je n?ai plus les moyens de mener à terme mon projet, J?appelle donc au soutien des pouvoirs publics, des entreprises tant étatiques que privées, et je les invite à s?impliquer dans mon action culturelle, car il s?agit d?un travail de mémoire, puisque le chaâbi n?est pas seulement une musique, il est aussi une culture et un patrimoine, ce sont des noms et des lieux, c?est donc une histoire, celle de l?Algérie ? notamment pendant la colonisation», explique-t-elle.