«Je suis un enfant d?Ighil n?Zeman (Tizi Hibel). Il faut bien tenir à son pays, être fier de son origine, ne pas se renier. Ma place est ici, je l?ai acquise et je la garde.» C?est ce que disait Amer des Chemins qui montent. Une confession lourde de sens, récusant toute équivoque quant à sa position vis-à-vis de son pays et de son identité. Cet écrivain invétéré arbore avec fierté ses origines et sa civilisation afin de montrer au monde entier que toutes se valent, que nulle ne peut effacer l?autre ou vivre à ses dépens ! Ceci, il le confirme à travers son ?uvre romanesque, mais aussi historique. L?histoire, il la raconte dans ses principaux romans : La Terre et le sang, Le Fils du pauvre, Les Chemins qui montent. Il dépeint la misérable et dure vie que tous ces fils de pauvres mènent. Cependant, un aspect prépondérant domine La Terre et le sang et Les Chemins qui montent» c?est le concept d?assimilation qui, comme le dit Christiane Achour, «est impossible dans les deux cas», c?est-à-dire qu?un Français ne peut s?intégrer à la vie d?un Algérien et vice-versa. Dans La Terre et le sang, Marie demeure l?éternelle étrangère malgré son adoption par le village. Dans Les Chemins qui montent, c?est Dahbia qui souffre des conséquences de sa conversion au christianisme et Amer, fils de Marie, est déchiré entre deux civilisations. Feraoun voyait dans les deux formes d?assimilation, une contradiction de nature. Différence de cultures, de religions et de traditions séculaires que cette civilisation d?outre-mer qui, loin d?ébranler, fortifie et rend plus virulente. Même l?émigration, toute une vie en France, n?en vient pas à bout. Feraoun écrit, à propos du Kabyle qui revient «au pays» : «? sa longue absence n?a d?ores et déjà plus d?autre signification que celle d?une parenthèse gigantesque, impuissante à changer le sens général d?une phrase.» C?était dans La Terre et le sang. L?échec de l?assimilation, ce concept hypocrite, lacère au lieu d?unir les deux peuples. Un constat amer que Mouloud Feraoun a fait «dans la période la plus dramatique de la colonisation, celle où la complexité des situations vécues a atteint une intensité parfois ingérable», comme l?affirme Christiane Achour. Par conséquent, un engagement quelconque relève de l?héroïsme. Il n?empêche que Mouloud Feraoun a su traduire en termes limpides, mais poignants et saisissants, cette réalité qui n?est ni exclusive ni prépondérante, mais surtout historique, levant toute équivoque sur l?avenir de l?Algérie.