Douleur Il aura fallu attendre un séisme dévastateur pour réaliser que nos immeubles ne sont pas si sûrs qu?on l?imaginait. 21 mai 2003. 19h 46. Quelques insignifiantes secondes vont, dans la douleur et la désolation, tout changer. Boumerdès, la paisible, est en ruine. Une secousse tellurique de forte magnitude (6, 2) frappe de plein fouet la ville et ses localités environnantes. Même Alger n?est pas épargnée. 23 ans après le séisme d?El-Asnam et ses 2 000 morts, les Algériens prennent conscience que sous leurs pieds une boule de feu est en perpetuelle effervescence. Le cataclysme fait des ravages. Des immeubles s?effondrent tel un château de cartes. Les images de lambeaux de chair, défilant sur les chaînes de télévision, marquent les consciences à tout jamais. Le «10» et le «15», deux imposantes bâtisses de Reghaïa ne sont que ruines et décombres. Dessous, des morts de tous âges. Le séisme ne choisit jamais ses victimes. Les bilans sont, chaque demi-heure, revus à la hausse. Le lendemain, la triste nouvelle fait le tour du monde. Les dons et messages de compassion affluent de partout. L?Algérie entière est en deuil. Zemmouri, Reghaïa, Boumerdès, Boudouaou, Alger-Plage, Bordj Menaïel et Belouizdad enterrent leurs morts dans la douleur, mais surtout avec le c?ur gros. Gros d?apprendre que les immeubles qu?ils occupaient n?était pas si sûrs. Ainsi, après les interminables enterrements et transferts de blessés dans les différents hôpitaux, commence la quête effrénée de la vérité. Hormis la nature, qui mettre aux box des accusés ? L?été ne s?attendait sans doute jamais à pareil épilogue. Les répliques se suivent et se ressemblent. Le Craag rassure, Bonatiro, lui, fait des émules, désormais, tout le monde se familiarise avec les avatars de la terre. Vient par la suite, l?heure des enquêtes et des mises en demeure. Des entrepreneurs véreux sont montrés du doigt. L?attribution des marchés, à coups de milliards, a été perçue comme l?une des causes ayant entraîné la mort en série. Le CTC, organisme du Contrôle des constructions, est, lui aussi, cloué au pilori. Ainsi, il aura fallu, malheureusement attendre un tremblement de terre dévastateur et quelque 3 000 morts pour réaliser que le tissu urbain n?est pas si sûr qu?on l?imaginait et que dans les centaines de chantiers à ciel ouvert, seul le profit compte. Des milliers de personnes se résignent, la mort dans l?âme et avec fatalité, à s?agglutiner en masse dans des camps de toile sous un soleil de plomb en attendant de passer «l?hiver au chaud», comme leur ont promis, nos responsables. Bouteflika et Ouyahia en premier.