Phénomène Livrés à eux-mêmes, à leur propres forces, à leur seule bonne volonté, les adolescents veulent grandir avant terme et être considérés. «Je ne reconnais aucune autorité à mon père sur moi, il n?ose même pas me toucher ou me donner son avis en ce qui concerne mes décisions, c?est interdit chez nous et cela depuis longtemps. C?est mon grand frère qui a instauré cet ordre des choses. Quand il était petit, il avait mis fin à la mauvaise habitude qu?avait mon père de nous frapper sans cesse et sans la moindre raison, il était très violent et nous étions obligés de demander son autorisation pour des choses futiles ! Un jour mon grand frère, qui en avait marre, s?est vu contraint de le menacer avec un couteau qu?il lui a mis sous la gorge et depuis ce jour-là, mon père n?est plus respecté par la famille. On ose même désobéir à ses ordres sans la moindre hésitation». Mourad, 17 ans, raconte le conflit qui l?oppose à son père depuis une dizaine d?années. Il affirme ne dire même pas bonjour à son père ni même à sa mère. «Ils ont une mentalité très arriérée, leur temps n?est plus le nôtre, moi je veux être plus libre, m?habiller comme je veux, écouter la musique que je veux et je veux même arrêter mes études le plus tôt possible pour faire du commerce alors que mes parents veulent que je reste toujours au lycée pour avoir mon bac. Je ne vois pas du tout l?intérêt des études. Mes parents me disent toujours que les études sont très importantes, qu?il faut travailler. C?est juste un discours, car ils n?étaient pas capables de nous aider à résoudre nos problèmes», conclut Mourad. Souad est étudiante en médecine à la faculté d?Alger. Elle ne partage pas du tout l?opinion de Mourad. Pour elle, l?autorité parentale n?a rien de mauvais. «C?est une valeur islamique, notre Saint Coran a ordonné aux enfants d?obéir à leurs parents dans tous les domaines de la vie et que la décision finale soit la leur, bonne ou mauvaise, sauf s?ils veulent leur faire changer de religion ou les obliger à devenir mécréants. Moi, par exemple, j?ai pour principe que c?est le père qui doit choisir le mari ou donner la permission à sa fille de se marier. C'est une exigence religieuse et fait partie de nos traditions.» Malika est d?un tout autre avis. Pour cette jeune fille qui prépare une thèse en anglais : «Les parents doivent demander l?avis des enfants, car notre génération est plus instruite et nos idées plus modernes. Prenons par exemple le mariage, la femme doit choisir l?homme avec qui elle veut partager une vie heureuse et tranquille. En revanche, les parents veulent que leur fille soit mariée à un homme riche, célèbre et bien placé, c?est ça le bonheur pour eux. Moi je ne pense pas qu?une fille qui refuse d?obéir à cette réalité n?est pas bien éduquée.»