On connaît l?attachement des Algériens à la religion ; aussi, il ne faut pas s?étonner que leurs langues en soient profondément imprégnées. En arabe comme en berbère, c?est le mot ddîn qui la désigne. Et le ddîn, ce n?est pas seulement la religion, c?est-à-dire le culte que l?on rend à la divinité, c?est aussi l?honneur, la dignité, la morale. Ainsi, quand on dit de quelqu?un qu?il n?a pas de religion, «ma ?ându-ch ddin», cela signifie qu?il n?a pas de parole. On précise parfois «ma ?ându-ch ddîn wah?ed» (il n?a pas une seule religion) pour signifier qu?il n?a pas une fidélité, ce mot devant être pris ici au sens étymologique de foi. Ne pas avoir une fidélité, une religion, est lourd de sens : comme les polythéistes des temps jadis, on sacrifie à plusieurs maîtres ou dieux, on s?attache à plusieurs cultes, bref, on n?a pas la pureté originelle du monothéisme, tant défendue par l?islam? Le verbe classique d?où provient le mot ddîn, dâna, signifie, outre «professer une croyance», «être loyal, être probe, être honnête». Allant dans ce sens, le mot ddîn, religion, signifie aussi «manière d?agir, état, condition», état et manière d?agir qui ne peuvent être, bien sûr, que droits et sincères ! C?est si vrai que la religion est vue comme quelque chose qui fait partie de l?être, qui lui permet de s?affirmer en tant qu?être doué de raison et de sentiments. «Ma tkheradjni-ch ?aâla ddîni» (ne me fais pas quitter ma religion), dit-on alors à celui qui presse un autre de faire quelque chose ou l?importune. «Sortir de sa religion» signifie faire n?importe quoi, dire n?importe quoi, aller n?importe où, sans le contrôle de la foi qui établit les manières d?agir?