Résumé de la 22e partie Lorsqu?AIaddin vit la princesse Badroulboudour, il perdit la pensée qu'il avait que toutes les femmes dussent ressembler à peu près à sa mère. Ses sentiments se trouvèrent bien différents et son c?ur ne put refuser toutes ses inclinations à l'objet qui venait de le charmer. En effet, la princesse était la plus belle brune que l'on put voir au monde : elle avait les yeux grands, à fleur de tête, vifs et brillants, le regard doux et modeste, le nez d'une juste proportion et sans défaut, la bouche petite, les lèvres vermeilles et toutes charmantes par leur agréable symétrie ; en un mot, tous les traits de son visage étaient d'une régularité accomplie. On ne doit donc pas s?étonner si Aladdin fut ébloui et presque hors de lui-même à la vue de l'assemblage de tant de merveilles qui lui étaient inconnues. Avec toutes ces perfections, la princesse avait encore une riche taille, un port et un air majestueux qui, à la voir seulement, lui attiraient le respect qui lui était dû. Quand la princesse fut entrée dans le bain, Aladdin demeura quelque temps interdit et comme en extase, en retraçant et en s'imprimant profondément l'idée d'un objet dont il était charmé et pénétré jusqu'au fond du c?ur. Il rentra enfin en lui-même ; et, en considérant que la princesse était passée et qu'il garderait inutilement son poste pour la revoir à la sortie du bain, puisqu'elle devait lui tourner le dos et être voilée, il prit le parti de l'abandonner et de se retirer chez lui. Aladdin, en rentrant chez lui, ne put si bien cacher son trouble et son inquiétude que sa mère ne s'en aperçût. Elle fut surprise de le voir ainsi triste et rêveur, contre son ordinaire ; elle lui demanda s'il lui était arrivé quelque chose, ou s'il se trouvait indisposé. Mais Aladdin ne lui fit aucune réponse, et il s'assit négligemment sur le sofa, où il demeura dans la même situation, toujours occupé à se retracer l'image charmante de la princesse Badroulboudour. Sa mère, qui préparait le souper, ne le pressa pas davantage. Quand il fut prêt, elle le servit près de lui sur le sofa, et se mit à table. Mais, comme elle s'aperçut que son fils n'y faisait aucune attention, elle l'avertit de manger, et ce ne fut qu'avec bien de la peine qu'il changea de situation. Il mangea beaucoup moins qu'à l'ordinaire, les yeux toujours baissés, et avec un silence si profond qu?il ne fut pas possible à sa mère de tirer de lui la moindre parole sur toutes les demandes qu'elle lui fit pour tâcher d'apprendre le sujet d'un changement si extraordinaire. Après le souper, elle voulut recommencer à lui demander le sujet d'une si grande mélancolie ; mais elle ne put en rien savoir, et il prit le parti de s'aller coucher plutôt que de donner à sa mère la moindre satisfaction sur cela. Sans examiner comment Aladdin, épris de la beauté et des charmes de la princesse Badroulboudour, passa la nuit, nous remarquerons seulement que le lendemain, comme il était assis sur le sofa, vis-à-vis de sa mère qui filait du coton à son ordinaire, il lui parla en ces termes : «Ma mère, dit-il, je romps le silence que j'ai gardé depuis hier à mon retour de la ville ; il vous a fait de la peine et je m'en suis bien aperçu. Je n'étais pas malade, comme il m'a paru que vous l'avez cru, et je ne le suis pas encore ; mais je ne puis vous dire ce que je sentais ; et ce que je ne cesse encore de sentir est quelque chose de pire qu'une maladie. Je ne sais pas bien quel est ce mal ; mais je ne doute pas que ce que vous allez entendre ne vous le fasse connaître.» «On n'a pas su dans ce quartier, continua Aladdin, et ainsi vous n'avez pu le savoir, qu?hier la princesse Badroulboudour, fille du sultan, alla au bain l'après-dîner.» (à suivre...)