Résumé de la 41e partie Le sultan donna des ordres pour faire cesser les réjouissances dans son palais, dans la ville et même dans tout le royaume. Ce changement subit et si peu attendu donna occasion à bien des raisonnements différents : on se demandait les uns aux autres d'où pouvait venir ce contretemps, et l'on n'en disait autre chose, sinon qu'on avait vu le grand vizir sortir du palais et se retirer chez lui accompagné de son fils, l'un et l'autre avec un air fort triste. Il n'y avait qu'Aladdin qui en savait le secret, et qui se réjouissait en lui-même de l'heureux succès que l'usage de la lampe lui procurait. Ainsi, comme il eut appris avec certitude que son rival avait abandonné le palais et que le mariage entre la princesse et lui était rompu absolument, il n'eut pas besoin de frotter la lampe davantage et d'appeler le génie pour empêcher qu'il ne se consommât. Ce qu'il y a de particulier, c'est que ni le sultan ni le grand vizir, qui avaient oublié AIaddin et la demande qu'il avait fait faire, n'eurent pas la moindre pensée qu'il pût avoir part à l'enchantement qui venait de causer la dissolution du mariage de la princesse. Aladdin cependant laissa écouler les trois mois que le sultan avait marqués pour le mariage d'entre la princesse Badroulboudour et lui ; il en avait compté tous les jours avec grand soin ; et, quand ils furent achevés, dès le lendemain, il ne manqua pas d'envoyer sa mère au palais pour faire souvenir le sultan de sa parole. La mère d'Aladdin alla au palais comme son fils lui avait dit, et elle se présenta à l'entrée du divan, au même endroit qu'auparavant. Le sultan n'eut pas plus tôt jeté la vue sur elle qu'il la reconnut et se souvint en même temps de la demande qu'elle lui avait faite, et du temps auquel il l'avait remise. Le grand vizir lui faisait alors le rapport d'une affaire. «Vizir, lui dit le sultan en l'interrompant, j'aperçois la bonne femme qui nous fit un si beau présent il y a quelques mois ; faites-la venir ; vous reprendrez votre rapport quand je l'aurai écoutée.» Le grand vizir, en jetant les yeux du côté de l'entrée du divan, aperçut aussi la mère d'Aladdin. Aussitôt il appela le chef des huissiers et, en la lui montrant, il lui donna ordre de la faire avancer. La mère d'Aladdin s'avança jusqu'au pied du trône, où elle se prosterna selon la coutume. Après qu'elle se fut relevée, le sultan lui demanda ce qu'elle souhaitait. «Sire, lui répondit-elle, je me présente encore devant le trône de Votre Majesté pour lui représenter, au nom d'Aladdin mon fils, que les trois mois après lesquels elle l'a remis sur la demande que j'ai eu l'honneur de lui faire sont expirés, et je la supplie de vouloir bien s'en souvenir.» Le sultan, en prenant un délai de trois mois pour répondre à la demande de cette bonne femme la première fois qu'il l'avait vue, avait cru qu'il n'entendrait plus parler d'un mariage qu'il regardait comme peu convenable à la princesse sa fille, à regarder seulement la bassesse et la pauvreté de la mère d'Aladdin, qui paraissait devant lui dans un habillement fort commun. La sommation cependant qu'elle venait de lui faire de tenir sa parole lui parut embarrassante : il ne jugea pas à propos de lui répondre sur-le-champ ; il consulta son grand vizir, et lui marqua la répugnance qu'il avait à conclure le mariage de la princesse avec un inconnu, dont il supposait que la fortune devait être beaucoup au-dessous de la plus médiocre. (à suivre...)