Le chef de l?Etat a remanié l?Exécutif. Il peut provoquer des législatives anticipées. Et si ce remaniement qui n?aura touché que les ministres FLN ne se révélait que le prélude à une autre action, à un autre coup de force du président Bouteflika ? La dissolution de l?APN est une question dans l?air depuis quelque temps déjà, comme l?a été cette éviction des pro-Benflis du gouvernement Ouyahia. C?est dire que, depuis vendredi soir, l?hypothèse d?un chamboulement de l?échiquier politique est à examiner avec un peu plus de sérieux. Elle est du domaine du possible, d?autant plus que la scène politique s?emballe chaque jour un peu plus : le torchon brûle jusqu?à l?incandescence entre Bouteflika et Benflis ; le soutien du FLN n?est ni acquis ni garanti au président dans l?éventualité d?un second mandat, cette virulente montée au créneau de Karim Younès à l?ouverture de la session parlementaire en a surpris plus d?un ; cet échange à fleuret moucheté entre lui et Bensalah, président du Sénat, a été relevé et enfin cette mobilisation au pas de charge de ceux qui veulent créer un FLN-bis. Ce n?est pas par hasard que le RND a évoqué avec insistance l?éventualité de la dissolution de l?APN, il y a à peine trois jours, alors que la classe politique s?interrogeait sur les retombées du discours du président de l?APN. Le chef du groupe parlementaire de la formation d?Ouyahia a déclaré : «L?Assemblée pourra être dissoute, s?il y a crise... Si les députés du FLN bloquent des projets de loi qui nous semblent importants, l?APN sera dissoute.» Or, il y a crise. Ce serait verser dans le ridicule que de nier la réalité : l?approche de la présidentielle a exacerbé les passions, ouvert la digue des calculs et aiguisé bien des appétits. La question est de savoir, maintenant que le président Bouteflika a renvoyé les ministres de Benflis, si celui-ci, fort actuellement de sa majorité au sein de l?hémicycle, ira, dans une tentative de riposte, jusqu?à bloquer l?APN. A priori, il n?a pas intérêt à le faire. Il risque, dans une éventuelle confrontation, lors des législatives anticipées, de perdre sa confortable avance en voix et en sièges. Benflis ne le fera pas a priori, étant pour l?heure l?homme du wait and see. Qui aura quelque chose à gagner dans une éventuelle dissolution de l?APN ? Le clan présidentiel ? Il y a là aussi des risques politiques, même si l?idée de casser «le FLN» et de couper l?herbe sous le pied au concurrent Benflis peut paraître attrayante. Alors ? Il faut s?arrêter pour l?instant à ce constat : il est dans les prérogatives du chef de l?Etat de procéder à la dissolution de l?APN. L?article 129 de la Constitution lui donne ce droit et ce pouvoir. Il s?est attaqué à l?Exécutif en «liquidant» les six ministres. Il peut se retourner contre le législatif, même à huit mois de l?échéance présidentielle. Le fera-t-il ?