L'article 573/ 90, portant crimes et délits commis par les membres du gouvernement, les hauts fonctionnaires et les magistrats, constitue l'un des textes les moins appliqués depuis l'indépendance, malgré le nombre important de scandales. La campagne anticorruption vient de franchir un nouveau pas. L'incarcération de l'ex-wali d'Oran et de Annaba, M.Bachir Frik, va-t-elle provoquer des remous au sein de la haute administration, notamment, le corps des walis? Cela est d'autant plus prévisible qu'il n'a eu cesse de déclarer que le jour où son emprisonnement interviendrait, il entraînera plusieurs têtes sur le banc des accusés. Lorsqu'il a été relevé de ses fonctions, il n'était pas ciblé personnellement, indiquent des sources. A l'époque, les remaniements dans le corps des walis, opérés suite aux directives du Président de la République, battaient leur plein. Bouteflika a promis que les reformes de l'Etat et l'administration passeront d'abord par les sanctions contre les cadres corrompus. Cela a fait que la chasse aux sorcières commence par l'exécutif et le législatif des collectivités locales. Tout le monde s'attendait alors, à la tombée des têtes à des échelons plus importants. Une façon de dépoussiérer l'article 573 de la loi 90-24 portant crimes et délits commis par les membres du gouvernement, les hauts fonctionnaires et les magistrats, considéré comme le texte de loi le moins utilisé depuis l'indépendance, malgré le nombre important de scandales. A ce propos, plusieurs walis, ainsi que d'autres hauts fonctionnaires dans différents secteurs, ont été priés de ne pas quitter le territoire national ou mis sous contrôle judiciaire. Les scandales successifs qui ont marqué la wilaya d'Oran ont très vite poussé l'affaire Frik à prendre d'autres tournures. Les enjeux étaient de taille, au point que plusieurs observateurs se demandaient s'il est l'unique coupable dans les scandales à Oran. Ce qui a été appelé communément «l'affaire Frik» depuis le début de la procédure d'investigation du parquet d'Oran, n'est certainement pas un cas isolé. Dans ce contexte, l'expérience a démontré que parmi plusieurs affaires l'on s'aperçoit que certains walis ou chefs de daïra ne sont que des exécutants, voire des boucs émissaires. La force des choses fait souvent d'eux des hommes de main et non des hommes d'Etat. Qui visait Frik lorsqu'il avait annoncé, dans les colonnes de la presse, qu'il entraînerait des gros bonnets avec lui? Certainement pas ceux qui ont été débusqués par l'enquête judiciaire, à savoir des cadres de la wilaya d'Oran ayant agi sous ses ordres. L'ex-DAS, l'ex-directeur de l'agence foncière de Bir El-Djir et quelques dizaines de fonctionnaires encore en poste au sein de l'administration. Ils sont combien à être cités dans des affaires scabreuses et qui exercent toujours dans différents rangs de l'administration ? Seules les statistiques officielles sont susceptibles d'annoncer le chiffre, si elles existent. La crédibilité de la Commission de réforme de l'Etat dépend en quelque sorte de cette interrogation. C'est dans ce contexte qu'il y a eu la naissance du nouveau code de conduite du wali, soumis aux chefs de l'exécutif des wilayas suite à la réunion de Zerhouni ministre de l'Intérieur avec les walis en avril 2000. Le mouvement de remaniement des walis a tout de suite été suivi par une action d'envergure dans le corps des walis, des magistrats et des chefs de daïra. Cette action a été, elle aussi, motivée par une décision émanant du Président de la République. Les mis en cause sont confrontés à trois options: la mutation, la retraite anticipée ou la radiation dans les cas les plus graves. L'Etat de droit ou le droit à un Etat. Loin de ce qui a été révélé dans le cas de l'affaire de l'ex-wali d'Oran, qui est loin d'être à son terme, certaines sources parient que les non-dits constitueraient le début d'une deuxième étape non moins importante que la précédente. Les dix dernières années, affirment nos sources, n'ont pas donné naissance uniquement à l'affaire Frik d'Oran. Quarante-huit autres wilayas n'ont pas encore livré tous leurs secrets ainsi que plusieurs secteurs économiques qui sont toujours sous le diktat de forces occultes, que seul le démantèlement de leurs serviteurs au sein de certaines institutions publiques, peut mettre au jour.