Le goût, comme le beau, est dans la tête des gens et peut varier, parfois énormément, d'une personne à l'autre, selon un des plus réputés neurobiologistes français, qui étudie les comportements alimentaires et en particulier les perceptions sensorielles humaines. «Personne ne sent de la même manière que son voisin», a découvert le spécialiste, auteur de recherches dans ce domaine depuis 40 ans. «Quand on perçoit une odeur, la nature exacte de la sensation dépend du produit et de l'observateur», et sa perception est donc infiniment variée. A l'inverse, l'expérience de la vision, de l'ouïe ou du toucher sont à peu près semblables pour tout un chacun et il existe un langage commun pour en faire la description. Selon les travaux de ce chercheur, les dents fournissent au cerveau près de la moitié des informations qu'il recueille à propos du goût, le nez apportant la plus grande partie du reste, via la bouche. La langue, elle, n'est à peu près d'aucune utilité. «Tant qu'on n'a pas goûté la chose, on ne peut pas la décrire ni l'apprendre par les mots», souligne le chercheur et le vocabulaire pour décrire les odeurs reste souvent très pauvre: «ça me plaît, ça me déplaît.» Pourtant, indique-t-il, «le système sensoriel humain pour les odeurs a atteint la sensibilité maximum possible, c'est-à-dire qu'une molécule peut provoquer une réponse dans une seule cellule, réponse qui sera transmise au cerveau.» Mais tout ne s'explique pas par le génome. L'éducation et la culture jouent aussi un rôle important en ce qu'elles déterminent ce que nous percevons comme bon ou mauvais, à l'exemple de l'odeur fécale qu'on «apprend» dès la toute petite enfance à considérer comme totalement répulsive.