Rencontre n Le colloque consacré à «la pensée politique algérienne de 1830 à 1962» s?est ouvert hier, dimanche, à l?hôtel El-Aurassi. Ont animé cette première journée du colloque nombre d?intellectuels dont Amar Talbi qui a évoqué le personnage de l?Emir Abdelkader. «Un personnage exceptionnel», dira-t-il. «Nombreux sont ceux qui ne connaissent de l?Emir Abdelkader que son militantisme politique et son combat militaire. Il se trouve que ce personnage est plus que ça : c?est un humaniste, un intellectuel, un penseur et même un philosophe. Cette dimension civilisationnelle de l?Emir est occultée, et l?on ne retient de lui que son parcours politique et son engagement militaire.» «C?était un homme de loi et de principe, reprend-il. Il puisait sa réflexion intellectuelle dans la pensée d?El Ghazali ou encore d?Ibn Khaldoun. Il était quelqu?un d?ouvert et d?attentif à toute connaissance quelle que soit son origine, pourvu qu?elle permette à l?individu de cheminer positivement dans la voie du progrès. Il réfutait tout traditionalisme anachronique et il était favorable à l?innovation.» Quant à Mahfoud Kaddache, il a projeté les faits qui ont favorisé la construction de l?Etat algérien, libre et indépendant, et donc la formation du nationalisme algérien. Il a jeté les premiers jalons de l?Etat algérien. Selon lui, le souci de créer un Etat algérien, avec ses fondements et ses institutions, ses frontières et sa notion de citoyenneté, un Etat souverain et libre, remonte à l?époque où les frères Barberousse, Baba Aroudj et Keïreddine, étaient venus à Alger. C?est lorsqu?ils se sont proclamés rois d?Alger que le projet politique, celui de créer une nation, un Etat et un gouvernement, est né. Il affirmera que l?Emir Abdelkader nourrissait l?ambition de créer un gouvernement, un Etat et une nation moderne avec les principes universels. Il l'avait d?ailleurs fait ; c?était cependant un Etat itinérant qui se déplaçait d?un territoire à un autre, puisqu?il était en guerre, de 1832 à 1847, contre l?armée coloniale française. Son projet n?a pas survécu puisque l?Emir a été contraint de capituler. Toutefois, la notion du nationalisme réapparaît près d?un siècle plus tard, juste au lendemain de la Première Guerre mondiale où un large mouvement nationaliste s?est répandu au sein de la société algérienne, dite à l?époque indigène. Enfin, et pour finir, Jean-Robert Henry a retracé, dans son exposé, l?histoire du Mouvement national algérien en se basant sur des textes de leaders et partis politiques. L?étude de ces textes, selon lui, aide à élargir le regard sur l?histoire de l?Algérie et à donner une dynamique à la réflexion sur le politique et le nationalisme algérien.