Le café, chez nous, fait partie du monde des hommes. C?est le lieu des réunions masculines. Et c?est durant le ramadan que ce lieu de prédilection acquiert toutes ses lettres de noblesse. Siroter un thé ou un café, qui peut paraître un geste banal, revêt dans ce lieu un caractère particulier, dans tous les coins et recoins, dans les quartiers populaires comme dans les résidences dites «chic» pour devenir un lieu choyé, chéri et béni durant le mois de jeûne. C?est un havre dans lequel se dispersent çà et là des nuages de fumée de cigarettes, des garçons qui font le va-et-vient entre les tables et le comptoir. Commande sur commande dans un espace clos, où on discute de tout et de rien, des heures et des heures, les neurones finalement éveillés après toute une journée de jeûne. On y oublie les vicissitudes de la journée pour préparer les activités laborieuses du lendemain. En somme, le café est autant un lieu de rencontre que de détente, à l'écart de l?ennui de la profession et même de la famille. Le jeu de dominos et de cartes occupe une place dans l?éventail des pratiques du café. La consommation, elle, tient étrangement une place secondaire. Bien qu'obligatoire, elle apparaît dans la pratique, plus souvent comme un prétexte ou un prélude aux contacts que comme une fin en soi. Comme les salamalecs ou les poignées de main, commander un café ou un thé fait partie des rites liés au café avec les multiples échanges dont il forme le lit. De vieux retraités, qui vaquent à la cadence de quelques divertissements, y retrouvent humeur et jeunesse à l?automne de leur vie.