Mémoire n Saïd Bouterfa expose à la galerie Art en liberté (sis Le Patrimoine, Kouba) des photographies sur les manuscrits anciens. Un pan de l?histoire de l?Algérie, de notre mémoire collective, une conscience historique partagée par nous tous durant des siècles, se trouve inscrit, à l?encre, noir sur blanc, dans de nombreux manuscrits qui, au fil du temps, revêtent une valeur historique précieuse, inestimable. Il se trouve que ces textes sont enfouis au fond des khizanate, des armoires que l?on trouve dans les zaouïa, notamment du Sud. Toutefois, ces manuscrits, témoins d?une civilisation et également d?un savoir-faire en matière d?art, celui de la calligraphie et de l?enluminure, sont menacés de disparaître. Notre mémoire est ainsi en péril. L?exposition qui comprend une trentaine de photographies réalisées par Saïd Bouterfa, en noir et blanc ou en couleur, de 1999 à 2005, montrent ces précieux documents, qui sont les manuscrits datant tous de plusieurs siècles (XIIIe, XIVe, XVe et XVIe). D?une rare beauté, ces manuscrits, aussi bien sacrés que profanes, sont des traités sur la fabrication des canons ou des textes sur les louanges de Dieu ou du Prophète. Est exposée également une tablette en bois, une louha, sur laquelle est inscrit un texte coranique. S?y ajoutent un encrier et quelques qalams à l?apparence ancienne, des outils que le scribe utilisait dans le temps. D?une grande authenticité, les manuscrits photographiés apparaissent cependant dans un état précaire : des textes que l?on voit fragiles, fragilisés par le temps, rongés par la poussière, dévorés par les insectes. Ces manuscrits qui sont notre mémoire tombent en miettes. L?exposition, qui se poursuit jusqu?au 7 novembre, se veut un aperçu du sort de notre histoire, sort tragique, si aucune mesure n?est entreprise en faveur des manuscrits. C?est-à-dire une politique consistant à collecter, à restaurer et à conserver ces manuscrits. Les manuscrits photographiés sont d?une extraordinaire beauté qui se traduit dans cette manière de calligraphier avec beaucoup de talent et de délicatesse la pensée, mais aussi dans ce souci de donner au texte plus d?harmonie, de joliesse et même de faste. Cette esthétique apparaît clairement dans l?ingéniosité et l?imagination que le scribe, à la manière d?un artiste-peintre, a déployées pour enjoliver le texte, notamment ses contours en l?ornant avec énormément de grâce et de couleurs. Cela rehausse sa splendeur et l?inscrit dans une authenticité que l?on ne peut pas nier ni dénier.