Résumé de la 2e partie n Les supputations de l?enquête policière allaient bon train. Le principal suspect de cette affaire, qui avait une relation avec le docteur et Philippe, est une fille. Pascale? Pascale est la jeune fille pour qui il a voulu mourir. Pascale avait écrit des lettres à Philippe, du temps de leur liaison. Et ces lettres, c'est le père et la mère de Philippe qui les ont conservées. L'expert dit : «L'écriture de Pascale a été imitée, à partir de ces lettres, par M. Pierre R., père de Philippe.» Le père nie. Et c'est assez étrange en effet qu'il soit le corbeau qui finit par se dénoncer lui-même. Alors que rien dans l'enquête jusqu'ici ne l'avait impliqué. Il nie jusqu'en février 1986, au cours de plusieurs interrogatoires, puis finit par avouer. Et le lendemain, sa femme raconte. Ils ont mis au point leur plan ensemble, l'ont exécuté ensemble, ils sont coupables tous les deux. Le 5 novembre 1983, elle a appelé le docteur Michel en contrefaisant sa voix, en donnant un faux nom et en le suppliant de venir la chercher sur l'avenue Einstein ; le médecin la verra de loin, elle vient de tomber et de se briser une cheville. Le médecin se rend sans méfiance au rendez-vous. Il note le faux nom, l'heure, le nom de l'avenue sans numéro, puisqu'il ne s'agit pas d'un domicile. L'avenue est déserte. Non loin de là s'élève le quartier industriel. Pas de circulation, pas de curieux. A son arrivée, il est immédiatement attaqué à coups de marteau, une arme de 1,340 kilo, dont on a scié le manche pour la dissimuler dans la poche. Le père a aussi transporté dans sa voiture une énorme pierre ornementale de jardin, avec laquelle il achève sa victime en lui fracassant le crâne. Il se penche pour écouter le c?ur, tâte le pouls pour s'assurer que le «responsable» du suicide de son fils est bien mort. Ensuite, ils mettent rapidement sur pied une mise en scène qui ne tiendra pas longtemps, la pierre étant destinée à faire croire à un accident. Le père va jeter le marteau dans les broussailles d'une autoroute, où il sera retrouvé plus tard. Et le père et la mère de Philippe rentrent chez eux. Vengés ? Apaisés ? Sûrement pas. Leur vengeance n'est pas suffisante. L'autre «responsable» du suicide de leur fils doit payer pour ce meurtre. Ils fouillent dans la correspondance de leur fils. C'est une idée de la mère ; le père, lui, imite la signature de la jeune Pascale et envoie la lettre anonyme. Ainsi, ils auront rendu la justice à leur manière. Cette mère, Bernadette, qui a cinquante-quatre ans au moment des aveux, on la sent capable, avec son visage dur et ses traits de bûcheron, de s'armer d'un marteau. Et pourtant, tous ceux qui la connaissent la décrivent comme une personne douce, serviable, dévouée, toujours prête à rendre service. Et c'est effectivement le père qui s'est servi du marteau. Cet homme de cinquante-six ans, en costume-cravate, la bouche pincée, le visage fermé sur un malheur incommensurable, était un commerçant tranquille. Marchand de charbon et mazout. Croyant, il fréquentait, avec sa femme, la chorale de l'église. Jusqu'au jour où, après le suicide de Philippe, il s'est pris de querelle avec le curé à propos de l'emplacement d'une cuve et ne lui a plus parlé. Ils se sont retirés de la chorale. La paranoïa ordinaire n'est pas très loin. Les experts psychiatres ont du travail. «Pierre R. a reporté sur des tiers son agressivité inconsciente vis-à-vis de ce fils qui a détruit l'image affective et sociale qu'il avait de lui-même.» La mère, en prison, fait un délire carcéral. Recroquevillée sur le lit de sa cellule, elle hurle de peur devant une assiette de plastique, à terre : «Les rats, ils m?ont mis des rats !» Le père envoie promener les «faiseurs de tests» psychologiques. Ils prétendent tous les deux avoir conclu à la «responsabilité» du docteur Michel à partir d?une phrase qu?il leur aurait dite lors de leur premier entretien piège. «Votre fils était décidé à mourir, je lui ai donné la marche à suivre pour ne pas souffrir.» (à suivre...)