Conversation n Notre rencontre avec Sonia nous a éclairé sur Hata l?tem, sa dernière création. Tous pensent que Sonia, femme de théâtre, s?est absentée des planches. Mais cette comédienne ? à fort caractère scénique ? ?uvre dans l?arrière-cour du théâtre, ce qui revient à dire qu?elle n?a jamais quitté la scène. «J?ai toujours continué à faire mon métier d?artiste», dit-elle. Et d?ajouter : «Je me suis consacrée en fait à de la mise en scène, car j?aime faire ça.» Tantôt metteur en scène, tantôt comédienne et parfois les deux, Sonia aime s?investir sur les deux fronts. Renouant avec le public, elle revient cette année en tant que comédienne et metteur en scène. Ecrit par Nadjet Taïbouni, Hata l?tem est un monologue que Sonia a co-mis en scène avec Richard Dermacy. Ce one woman show est venu «d?un désir de monter à nouveau sur les planches», confie-t-elle ; et cette passion est perceptible dans son jeu. Sonia, qui joue le personnage d?une psychologue, endosse également plusieurs caractères qui constituent notre société ; celle-ci apparaît multiple, contradictoire et complexe dans ses différences. Le jeu est difficile et méticuleux, aéré et lapidaire. Il est composé et difficile, car la comédienne doit passer de l?un à l?autre tout en revenant au personnage initial qu?est la psychologue. «Les personnages sont au préalable bien définis», explique-t-elle, ajoutant qu?il suffit d?enfiler certains éléments de costumes pour pouvoir se mettre dans la peau du personnage. En effet, sur les six chaises, faisant partie du décor, sont déposés quelques effets vestimentaires que Sonia utilise pour incarner la personnalité de chacun de ses patients. Ce qui rend son jeu fluide et sagace. Le monologue Hata l?tem traite un sujet social. Il aborde nombre de maladies et complexes psychiques et ce, à travers des échantillons contradictoires de la société. En fait, c?est une société avec ses tabous qui est dite, une société qui se tait, donc hypocrite parce qu?elle se cache derrière des apparences qui ne font que la jeter dans le désarroi, la rendre donc plus instable. «Je porte un regard, celui d?un artiste, sur la société», explique-t-elle. Et de poursuivre : «Je ne prétends nullement faire de l?analyse sociologique ou encore psychologique. C?est seulement pour montrer ces comportements différents qui constituent notre société. C?est aussi pour parler d?une société déchirée, qui a perdu ses repères. C?est-à-dire une société qui se cherche.» Il y a effectivement une quête d?identité, une recherche de soi. Aucun de ses patients n?est à l?aise dans son personnage. Tous souffrent de traumatisme, de déficit émotionnel et moral. Hata l?tem se veut donc une critique du comportement de la société, une société en prise avec elle-même, continuellement en proie à l?antinomie existentielle. Une critique, mais aussi un regard amusé, de l?humour qui, d?un bout à l?autre, ponctue le texte. Il y aussi de l?émotion. «Je travaille beaucoup sur l?émotion : les gens rient et pleurent en même temps», dit-elle. Une émotion qui les pousse à s?interroger et réfléchir sur leur condition.