La psyché reste encore, pour une grande part, un tabou chez nous. Beaucoup d'Algériens hésitent beaucoup moins à se rendre chez un raqi que chez un psychologue. Au moment où, sous d'autres cieux, la consultation d'un psychologue s'est banalisée, chez nous, elle tarde à devenir un phénomène de société ; les mots folie, retard mental, complexes et dépression caractérisent toujours ce sujet qui reste un véritable tabou. La décision d'aller consulter un psychologue ou tout autre médecin de la santé mentale reste toujours difficile à prendre, dans une société marquée par le poids des traditions et de la religion. «Reconnaître qu'on a un problème et arriver à en parler reste toujours un tabou chez nous», explique le Dr Laïdi, du centre spécialisé en psychothérapie de Dely Ibrahim. Ces idées reçues font que l'Algérien se méfie toujours du psychologue. Les facteurs qui ont accentué cette vision négative de la société sur ce domaine, pourtant scientifique, sont nombreux. D'abord, le poids de la religion. Les Algériens, en majorité croyants, ne voient pas la nécessité de consulter un psychologue. Ils expliquent souvent les problèmes de personnalité et les perturbations du caractère par une volonté divine. Cela se constate surtout lors des catastrophes et des malheurs. «Chacun essaye de se soulager en renvoyant les conséquences à une volonté majeure qui châtie les humains en raison de leur mauvais comportement», explique le Pr Ghaoui Djamel, du département de psychologie à l'université d'Alger. Le deuxième facteur est celui des traditions et des préjugés. «Depuis toujours, la consultation d'un psychologue se fait discrètement et anonymement ; on n'y recourt que si le besoin est urgent (maladie). Parfois, le patient supplie même son psychologue de ne pas divulguer son identité de peur du qu'en-dira-t-on, alors qu'on est tenu par le secret professionnel», souligne le Pr Ghaoui. La formation des psychologues, en Algérie, laisse toujours à désirer, selon lui. Sur un autre plan, le Pr Ghaoui explique qu'entre la théorie et la pratique, c'est un véritable blocage vu la complexité de la société algérienne où le dialogue et la communication, deux valeurs qui simplifient la banalisation de la psychothérapie, ne sont pas encore bien enracinées.