Tendance n Selon des témoignages, de nombreux Algériens font plus confiance à un thérapeute traditionnel (raqi) qu'à un psychologue. «Durant le séisme de 2003 à Boumerdès, on a constaté que beaucoup de personnes qui ont perdu des proches refusaient de consulter des psychologues algériens et étrangers dépêchés sur les lieux, leur préférant des imams et des religieux qui leur expliquaient que cette catastrophe était un châtiment divin...», explique le Dr Harchi, psychologue privé à Alger. Seule une certaine catégorie d'intellectuels s'est confiée à eux. Ce phénomène n'est pas nouveau en Algérie. De nombreuses familles traditionnelles algériennes préfèrent consulter, en cas de difficulté, de dépression, de stress ou de complexe, des raqis ou des «médecins religieux» (raqi chara'î) . «C'est dû à un manque de culture psychologique. Les gens pensent que les changements de comportement ou les difficultés psychologiques sont dus à des esprits malveillants ou à des génies (djinns) malfaisants et que seule la consultation d'un raqi peut les guérir», explique le Dr Harchi. Ce dernier, qui exerce depuis 15 ans, souligne aussi que «le niveau» de la nouvelle génération de psychologues est l'une des raisons qui poussent les gens à «s'en méfier». Selon lui, les méthodes qu'ils utilisent ne sont pas scientifiques et les résultats de leur thérapie ne sont pas toujours garantis. Un jeune étudiant, habitué à se faire soigner pour des troubles de sommeil chez l'imam de la ville de Chéraga, raconte : «Cela fait 10 mois que je n'arrive pas à dormir et je ne sais pas pourquoi. Après une longue hésitation, je me suis décidé à aller voir un psy mais croyez-moi, il m'a encore compliqué l'existence avec ses questions sur ma vie privée et intime… J'ai décidé alors de consulter un raqi et au bout de deux mois, j'ai pu constater la différence. Au moins, lui ne pose pas beaucoup de questions...» Selon le Dr Ghaoui, professeur de psychologie à l'université d'Alger, les personnes qui consultent un raqi, sont surtout convaincues par la «parole de Dieu» qu'il récite plus que par ses propres capacités de guérison. Il explique aussi que c'est l'ignorance des gens qui les pousse à préférer un raqi, tout en soulignant que certains psychologues utilisent un langage technique trop académique avec leurs patients qui sont souvent incapables de déchiffrer, alors que le raqi parle un langage populaire très clair.