Etat des lieux n Le Théâtre algérien semble languir dans le désuet. Le théâtre, chez nous, est poussiéreux, archaïque, relève d'un autre temps. Malgré les efforts déployés en vue de le refonder, de l'inscrire dans de nouvelles perspectives visant à l'adapter à des thématiques et esthétiques inédites, il semble languir dans le désuet. Le manque d'exigence, de rigueur et surtout d'ouverture sur ce qui se fait sous d'autres cieux explique la marasme où se débat le 4e art. Cette méconnaissance des pratiques en cours sous d'autres cieux retarde rudement le développement de notre théâtre, donc de la société. Interrogé, Dominique Brodin, directeur d'une compagnie de théâtre parisienne, le Centre dramatique de La Courneuve, et que nous avons rencontré dans le cadre du festival natioanl du théâtre professionnel, estime nécessaire qu'une troupe théâtrale développe et renouvelle des pratiques théâtrales et habitue le public à exercer la langue du théâtre qui est universelle et qui est en même temps un outil d'émancipation. En effet, pratiquer le théâtre en toute ouverture d'esprit aide à cultiver de nouvelles manières d'imaginer autrement la scène, de recréer le jeu et d'apporter, selon des sensibilités neuves, de nouvelles esthétiques permettant d'approcher le public, créant ainsi une complicité entre les acteurs et l'assistance. Hormis quelques auteurs tels que Abdelkader Alloula ou Kateb Yacine, Dominique Brodin a très peu de connaissance de ce qui s'écrit en langue arabe ; il affirme que les gens du métier soulèvent la même problématique qu'en France. Il y a «l'existence (en Algérie) d'une réflexion véritable relative à la relation du théâtre au public, une réflexion qui rejoint notre réflexion, aussi», dit-il. C'est-à-dire comment faire venir le théâtre au public sachant qu'il est ouvert à tout le monde. En effet, si le théâtre algérien souffre d'un malaise, c'est seulement parce qu'il n'y a plus de public ; et s'il n'y a plus de public, c'est parce que le théâtre ne répond ni à ses aspirations ni à sa sensibilité. Et pour parer à cela, il est nécessaire de faire adhérer le théâtre à l'éducation. A cet effet, Dominique Brodin nous parle de son expérience. «Dans notre pratique, on fait du théâtre avec des enfants, des adolescents en milieu scolaire et même hors des écoles. On en fait même dans les universités en animant des ateliers. Cela répond, en partie, à la formation du public. Ma compagnie s'emploie à tisser une relation de vérité entre le théâtre et le public. Notre objectif, d'ailleurs, est d'initier les jeunes à apprendre à regarder, à écouter le théâtre. Le théâtre doit aller vers le public en toute modestie. S'il ne trouve pas son public, le théâtre n'existerait pas. C'est un geste d'altérité.» Enfin, Dominique Brodin pour qui le théâtre est la parole d'un acteur, le geste d'un artiste s'adressant au public, met l'accent sur l'importance de l'art des planches. «C'est un acte fondateur d'une civilisation. C'est autour du théâtre que les sociétés se sont organisées», explique-t-il.