Banalisation La corruption est devenue le phénomène le plus manifeste et le plus répandu. En effet, un récent rapport du Cnes disait d?elle qu?elle s?étale en plein jour. Pourtant, jusqu?à la moitié des années 1970, la corruption était encore très marginale, quasiment réservée à la nomenklatura. Ceux qui y recouraient prenaient bien soin de ne pas étaler ce qui était alors perçu comme le gain de la honte et du péché. Ainsi, il était rare, contrairement à aujourd?hui, que des commis de l?Etat, des magistrats ou d?une manière générale des responsables dont le revenu se limitait à leur traitement, montrent des signes ostentatoires de richesse, tels construire de somptueuses demeures ou rouler carrosse. Mais le pays allait basculer, presque sans transition, d?un système obsolète d?économie mal dirigée à un autre d?économie non pas libérée, mais débridée et mise sous coupe réglée par des satrapes aux dents longues et qui allaient recourir aux services de pseudotechnocrates. Ceux-ci avaient la latitude de s?essayer aux alchimies les plus absurdes. Il leur fallait juste installer un épais brouillard, propice à toutes les subtilisations. Un gâchis incommensurable fut perpétré, juste pour mettre en place un vaste réseau d?accaparement des richesses par une oligarchie. L?économie algérienne fut partagée en chasses gardées. Deux épiphénomènes allaient en découler : le «trabendo» et la corruption des fonctionnaires. Ce fléau ravageur allait s?étendre à tous les secteurs névralgiques de l?Etat. Les plus remarqués seront ceux de l?administration fiscale, de la justice et du bâtiment. Personne, en Algérie, n?ignore l?incroyable gabegie qui triomphe dans ces milieux. L?ampleur de la permissivité et l?absence de l?Etat montrent bien qu?il sera très difficile, voire quasiment impossible, de réduire ce fléau. La pratique des pots-de-vin est devenue une chicane pour initiés. Le plus grave dans tout cela, c?est que toute la faune à l?origine de cette immense forfaiture ne se fixe plus aucune limite.