Résumé de la 118e partie n La vieille vipère, Mère-des-Calamités, son cœur plein de haine et de vengeance après la cuisante défaite des Roum, appliqua sur les blessures de Scharkan une pommade... A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut. Quand vint le soir, elle dit : Lorsque Scharkân fut complètement plongé dans le sommeil, l'horrible vieille, qui le guettait comme une louve féroce ou comme une vipère des pires, se leva sur ses pieds et se glissa affreusement jusque près du chevet et tira de son vêtement un poignard empoisonné avec un poison si terrible que, posé simplement sur le granit, il l'eût fait fondre. Elle tint ce poignard de sa main calamiteuse et, l'abaissant brusquement sur le cou de Scharkân, sépara la tête du tronc. Et c'est ainsi que mourut, par la force de la fatalité et les machinations d'Eblis dans l'esprit de la vieille maudite, celui qui fut le champion des musulmans, l'inégalable héros Scharkân, fils d'Omar Al-Némân. Et, sa vengeance satisfaite, la vieille déposa près de la tête coupée une lettre écrite de sa main et où elle disait : «Cette lettre est de la part de la noble Schaouahi, celle qui, à cause de ses exploits, est connue sous le nom de Mère-des-Calamités, aux musulmans présents au pays des chrétiens. «Sachez, ô vous tous, que c'est moi seule qui ai éprouvé la joie de supprimer autrefois votre roi Omar Al-Némân, au milieu de son palais ; c'est moi qui ai ensuite été la cause de votre déroute et extermination dans la vallée du monastère ; c'est moi enfin qui, de ma propre main et grâce à mes ruses bien combinées, ai coupé la tête aujourd'hui à votre chef Scharkân. Et j'espère qu'avec l'aide du Ciel, je couperai également la tête à votre roi Daoul'makan et à son vizir Dandân ! «A vous autres maintenant de réfléchir pour savoir s'il vous est avantageux de rester dans notre pays ou de retourner dans le vôtre. En tout cas, sachez bien que jamais vous ne parviendrez à vos fins ; et vous périrez tous jusqu'au dernier, sous les murs de Constantinia, par mon bras et mes stratagèmes, et grâce au Christ, notre Seigneur !» Et, ayant déposé cette lettre, la vieille se glissa hors de la tente et rentra à Constantinia mettre les chrétiens au courant de ses méfaits ; puis elle entra à l'église prier et pleurer sur la mort du roi Aphridonios et remercier le démon pour la mort du prince Scharkân. Mais pour ce qui est du meurtre de Scharkân, voici ! A l'heure même où cela s'accomplissait, le grand vizir Dandân se sentait pris d'insomnie et d'inquiétude, et il était oppressé comme si le monde entier lui eût pesé sur la poitrine. Il se décida enfin à se lever de son lit ; et il sortit de sa tente pour respirer l'air ; et, comme il se promenait, il vit l'ascète qui, déjà loin, s'éloignait rapidement hors du camp. Alors il se dit : «Le prince Scharkân doit être seul maintenant. Je vais aller veiller près de lui, ou causer avec lui s'il est réveillé.» Lorsque le vizir Dandân arriva dans la tente de Scharkân, la première chose qu'il vit fut une mare de sang par terre ; puis, sur le lit, il aperçut le corps et la tête de Scharkân assassiné. A cette vue, le vizir Dandân jeta un cri si haut et si terrible qu'il réveilla tous les hommes endormis et mit sur pied tout le camp et toute l'armée, et aussi le roi Daoul'makân, qui aussitôt accourut sous la tente. Et il vit le vizir Dandân qui pleurait à côté du corps sans vie de son frère le prince Scharkân. A ce spectacle, Daoul'makân s'écria : «Ya Allah ! ô terreur !» et tomba évanoui... (à suivre...)