Bien que déçu par l'élimination cruelle de la sélection de son pays dans les deux dernières minutes de la prolongation, Franz Beckenbauer est resté debout, impressionnant par son élégance et son port altier. Il n'est pas le Kaiser pour rien, et un empereur de sa trempe ne se laisse pas envahir par l'amertume ambiante qui se dégagea à l'issue de la rencontre contre l'Italie. Il est resté debout, applaudissant les joueurs de la Mannschaft, tous émus ou les yeux en pleurs car ayant perdu le trophée le plus cher au monde. Beckenbauer, lui, malgré la désillusion, peut s'enorgueillir d'avoir gagné sa coupe après l'avoir emportée en tant que joueur et capitaine de l'Allemagne de l'Ouest en 1974 et en tant que sélectionneur en 1990. L'homme aux 103 sélections, vainqueur du championnat d'Europe des nations de 1972, de trois coupes d'Europe des clubs champions, d'une coupe des vainqueurs de coupes européenne, de quatre championnats avec le Bayern Munich, peut être fier d'avoir gagné son pari le plus difficile : celui de réussir l'organisation de la Coupe du monde Fifa-2006. ? la veille d'une finale titanesque entre la France et l'Italie, le Kaiser, l'homme chargé de mettre en œuvre le plus grand événement de la planète, a pleinement contribué à l'organisation parfaite d'une compétition par une nation connue pour sa discipline, sa rigueur, sa ponctualité, son savoir-faire et qui s'est découvert d'autres vertus comme la chaleur et l'enthousiasme autour de cette coupe et autour de son équipe. Et là où les politiciens ont échoué, le football a réussi en réunissant encore plus les Allemands de l'Ouest et ceux de l'Est qui, faut-il le rappeler, ont accueilli pour la première fois la Coupe du monde. Aidé par son expérience en tant que joueur et entraîneur, le président du comité d'organisation de la Coupe du monde a placé la barre trop haut en offrant toutes les commodités et en répondant aux besoins les plus élémentaires des sélections présentes et de leurs supporters. Sur le plan populaire, la réussite est totale avec des stades toujours pleins, même pour des affiches moins évidentes comme Arabie saoudite - Tunisie ou Equateur - Costa Rica. Le Kaiser a profité de ce mois exceptionnel dans la vie d'un homme pour convoler en justes noces entre deux matchs car, il faut le préciser, il n'a raté aucune des 62 rencontres disputées jusqu'à maintenant, même celles de la troisième journée de la phase de poules qui se déroulaient en même temps ! Il a veillé au grain, il a été aux petits soins comme un maître de cérémonie avant de passer la main, et pour la première fois dans l'histoire, à l'Afrique pour dresser, dans quatre ans, le grand chapiteau du monde. L'Afrique aura alors certainement besoin des leçons allemandes, de l'expérience et des conseils de Franz Beckenbauer, le seul homme à avoir gagné cette coupe en tant que joueur, sélectionneur et … organisateur.