Résumé de la 153e partie n Aziz se retrouve dans une grande pièce luxueuse où la belle jeune fille lui impose un choix : l'épouser ou mourir. Alors elle se mit à rire et me dit : «Comment, Aziz ! Tu ne connais pas la fille de Dalila-la-Rouée ? Et voilà déjà un an et quatre mois qu'elle est ton amante ! Pauvre Aziz, crains, oh ! crains les perfidies de cette coquine qu'Allah confonde ! En vérité, il n'y a pas sur terre âme plus corrompue que la sienne ! Que de victimes tuées de sa propre main ! Que de crimes commis sur ses nombreux amoureux ! Aussi suis-je bien étonnée de te voir encore sain et sauf toi-même, depuis le temps que tu la connais !» A ces paroles de la jeune fille, je fus à la limite dernière de l'ébahissement, et je dis : «O ma maîtresse, pourrais-tu m'expliquer comment tu es parvenue à connaître cette personne et tous ces détails inconnus de moi-même ?» Elle répondit : «Je la connais aussi bien que le Destin connaît ses propres décisions et les calamités qu'il recèle ! Mais avant de m'expliquer là-dessus, je désire apprendre de ta bouche le récit de ton aventure avec elle. Car, encore une fois, de te voir sortir vivant d'entre ses mains, je suis encore tout étonnée.» Alors moi je racontai à la jeune fille tout ce qui m'était arrivé avec mon amoureuse du jardin et avec ma pauvre Aziza, la fille de mon oncle ; et elle, au nom d'Aziza, compatit énormément à ses peines et jusqu'à en pleurer à chaudes larmes et, en signe de désespoir sans recours, elle frappa ses mains l'une contre l'autre et me dit : «Qu'Allah t'en dédommage par ses bienfaits, ô Aziz ! Je vois clairement à présent que tu ne dois ton salut d'entre les mains de la fille de Dalila-la-Rouée qu'à l'intervention de la pauvre Aziza ! Maintenant que tu l'as perdue, garde-toi bien des embûches de la perfide... Mais il ne m'est pas permis de t'en révéler davantage : le secret nous lie !» Je dis : «Oui, certes ! Tout cela m'est arrivé avec Aziza !» Elle dit : «Ah ! vraiment, il n'y a plus aujourd'hui de femmes aussi admirables qu'Aziza !» Je dis : «Bien plus, sache qu'avant de mourir elle me recommanda de dire à mon amoureuse, celle que tu appelles la fille de Dalila, ces simples paroles : que la mort est douce et préférable à la trahison !» A peine venais-je de prononcer ces mots qu'elle s'écria : «O Aziz, voilà justement les paroles dont le simple effet te sauva d'une perdition certaine. Vivante ou morte, Aziza continue à veiller sur toi ! Mais laissons les morts : ils sont dans la paix d'Allah. Nous, occupons-nous du présent : sache donc, ô Aziz, qu'il y a longtemps que je désire de t'avoir à moi, la nuit comme le jour ; et c'est aujourd'hui seulement que j'ai pu enfin mettre la main sur toi. Et tu vois que j'ai réussi !» Je répondis : «Oui, par Allah !» Elle continua : «Mais tu es jeune, ô Aziz, et tu ne te doutes pas de toutes les roueries dont est capable une vieille femme comme ma mère !» Je dis : «Non, par Allah !» Elle continua : «Résigne-toi donc à ta destinée et laisse-toi faire : tu n'auras qu'à te louer de ton épouse. Car, encore une fois, je ne veux m'unir avec toi que par contrat légitime devant Allah et son Prophète (sur lui la prière et la paix !). Et tous tes souhaits seront alors exaucés et au-delà : richesses, belles étoffes pour tes robes, turbans légers et immaculés, tout cela te viendra sans dépense de ta part ; et jamais je ne te permettrai de délier ta bourse, car chez moi le pain est toujours frais et la coupe remplie. Et, en retour, je ne te demanderai qu'une seule chose, ô Aziz !» (à suivre...)