Résumé de la 154e partie n Aziz ne comprend plus dans quelle situation il s'est empêtré. La femme se joue de lui ; il se sent perdu dans un jeu dont les règles lui échappent. Je dis : «Laquelle ?» Elle dit : «C'est que tu fasses avec moi exactement ce que fait le coq !» Je dis, étonné : «Et que te fait donc le coq ?» A ces paroles, la jeune fille eut un retentissant éclat de rire et si fort qu'elle faillit tomber ; et elle se mit à trépigner de joie en frappant ses mains l'une contre l'autre. Puis elle me dit : «Comment ! tu ne connais pas le métier du coq ?» Je dis : «Non, par Allah ! Je ne connais point ce métier ! Quel est-il ?» Elle dit : «Le métier du coq, ô Aziz, est de manger, de boire et de… !» Alors moi je fus vraiment tout à fait confus de l'entendre ainsi parler, et je dis : «Non, par Allah ! je ne savais point que ce fût là un métier !» Elle répondit : «C'est le meilleur, ô Aziz ! Hardi donc ! Lève-toi, ceins ta taille, fortifie tes reins !» Et elle cria à sa mère : «O ma mère, viens vite !» Aussitôt je vis entrer la mère, suivie de quatre témoins officiels, tenant chacun un flambeau allumé, et ils s'avancèrent, après les salams d'usage, et s'assirent en rond. Alors la jeune fille se hâta, selon la coutume, d'abaisser son voile sur son visage et de s'entourer de l'izar. Et les témoins s'empressèrent d'écrire le contrat ; et elle voulut généreusement reconnaître avoir reçu de moi une dot de dix mille dinars pour tous comptes arriérés ou à venir ; et elle se constitua ma débitrice, sur sa conscience et devant Allah, de cette somme. Puis elle donna la gratification d'usage aux témoins, qui s'en allèrent, après les salams, par où ils étaient entrés. Et la mère aussi s'éclipsa. Alors nous restâmes seuls tous les deux, dans la grande salle aux quatre arcades vitrées. A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut. Le soir venu, elle dit : Nous restâmes seuls tous deux, dans la grande salle aux quatre arcades vitrées. Alors la jeune fille se leva et, me prenant la main, elle me mena au fond de l'alcôve, où elle me dit : «Cela nous est maintenant permis. Il n'y a point de honte dans ce qui est licite ! Agis comme tu l'entends, je suis ton esclave soumise !» Après quoi, nous nous endormîmes jusqu'au matin. Alors, comme je me disposais à m'en aller, elle vint à moi avec un rire malin et me dit : «Où vas-tu ? Crois-tu donc, comme ça, que la porte de sortie est aussi large ouverte que la porte d'entrée ! Aziz, détrompe-toi, naïf Aziz ! Et surtout ne me prends pas pour la fille de Dalila-la-Rouée ! Ah oui ! Hâte-toi de délaisser cette injurieuse pensée, Aziz ! Oublies-tu donc que tu m'es légitimement uni par un mariage avec contrat, confirmé par la Sunna ? Si tu es ivre, Aziz, dégrise-toi et rentre dans ta raison. Regarde ! La porte de cette demeure, où nous sommes, ne s'ouvre qu'une fois l'an pour un jour seulement. Lève-toi, d'ailleurs, et va contrôler mes paroles !» Alors moi je me levai, effaré, et me dirigeai vers la grande porte ; et, l'ayant examinée, je constatai qu'elle était verrouillée, barrée, clouée et condamnée définitivement. Et je m'en retournai vers l'adolescente et lui dis qu'en effet la chose était exacte. Elle sourit, heureuse, et me dit : «Aziz, sache qu'ici en abondance nous avons de la farine, des grains, des fruits frais et secs, des grenades à l'écorce desséchée, du beurre, du sucre, des confitures, des moutons, des poulets et autres choses semblables, de quoi nous suffire pendant un nombre appréciable d'années. De plus, je suis maintenant aussi sûre de ton séjour ici, avec moi, l'espace d'une année, que de l'existence de tout cela ! Résigne-toi donc et laisse cet air et ce visage de travers !» (à suivre...)