? Où vas-tu, prince ? lui demanda le nain. ? Au combat, répondit-il. ? Mais tu n?iras pas loin sur une rosse pareille ! Et tu es encore palefrenier ! Viens donc chez moi, je t?invite. Le nain l?emmena dans son isba et lui versa un verre d?eau, le fils du roi but. ? Sens-tu venir de la force en toi ? lui demanda le nain. ? Oui, si on me lançait une massue de 800 kilos sur la tête, je ne sentirais rien. Le nain lui servit un deuxième verre. ? Et maintenant, as-tu plus de force ? ? Oui, une massue de 100 kilos, je la lancerais au-dessus des nuages. Il lui versa un troisième verre. ? Et maintenant, quelle est ta force ? ? S?il y avait un pieu de la terre jusqu?au ciel, je le prendrais et d?un geste, je renverserais l?univers. Le nain tira de l?eau d?un autre tonneau et le donna au prince. Il le but et sa force fut alors réduite au septième. Après cela, le nain sortit sur le seuil de son isba et poussa un sifflement strident. D?on ne sait où, arriva au galop un cheval d?un noir luisant. La terre trembla. De ses naseaux sortaient des flammes, de ses oreilles des colonnes de fumée, de dessous ses sabots jaillissaient des étincelles. Il arriva jusqu?à la porte et se mit à genoux. ? Voilà ton cheval, dit le nain au prince. Il lui donna aussi une massue de guerre et un fouet de soie. Le fils du roi partit sur son morceaux combattre les ennemis. Il aperçut alors son menin qui était grimpé en haut d?un bouleau et qui tremblait de peur. Il donna un coup de cravache et s?élança sur l?ennemi. Il anéantit une masse de combattants avec son épée, en écrasa encore plus sous les sabots de son cheval. Et finalement, il trancha les sept têtes du monstre. Grâce au miroir qu?elle avait dérobé, la fille du roi savait déjà tout cela, car elle n?avait pas pu s?empêcher de lui demander à qui elle serait promise. Elle se précipita à la rencontre du vainqueur et lui demanda : ? Comment dois-je te remercier ? ? Donne-moi un baiser, belle demoiselle, répondit le prince. La fille du roi, sans honte, le serra contre son c?ur ardent et lui donna un baiser si bruyant qu?il résonna dans toute la plaine et que l?armée entière l?entendit. Le fis du roi éperonna son cheval et fila. Il retourna s?installer dans sa chambre, comme s?il n?avait pas participé au combat. De son côté, le menin se vantait, et racontait à tout le monde : ? C?est moi qui ai vaincu le monstre ! C?est moi qui ai vaincu le monstre ! Le roi le prit en grande estime, le fiança à sa fille et ordonna une fête. Seulement, la fille du roi n?était pas sotte, elle déclara soudain qu?elle avait mal à la tête et que son c?ur allait défaillir. Le futur gendre du roi se savait plus que faire. ? Cher beau-père, dit-il au roi, donne-moi un navire, je vais aller chercher un médicament pour ma fiancée. Ordonne au palefrenier de venir avec moi. Je suis tellement habitué à lui ! Le roi l?écouta, lui donna un navire et lui confia son palefrenier. Les voilà partis, ils voguèrent ici et là. Le menin ordonna de coudre un sac, d?y mettre le palefrenier et de le jeter à l?eau. La fille du roi regardait souvent dans le miroir. Elle vit qu?un malheur allait arriver. Elle s?installa dans son carrosse et se précipita vers la mer. Le nain de la forêt était là sur le rivage, qui cousait un filet de pêche. ? Paysan ! lui dit-elle, soulage mon chagrin. Le méchant menin a jeté le fils du roi à la mer. ? Volontiers, belle demoiselle ! Mon filet est justement prêt. Je te le donne. Prends-le entre tes branches menottes. La princesse lança le filet qui se déploya jusque dans la mer profonde. Elle repêcha la fils du roi et l?emmena avec elle. De retour au château, elle raconta tout à son père. La fête du mariage fut aussitôt célébrée. Chez le roi, pas besoin de faire fermenter le miel, pas besoin de distiller le fin, il y avait tout à discrétion ! C?est alors que le menin fut de retour, après avoir acheté plusieurs drogues. Dès qu?il pénétra dans le palais, on mit la main sur lui. Il s?agenouilla en implorant le roi, mais il était trop tard. Sur le champ, il eut droit au gibet. Le mariage de la fille du tsar fut plein de gaieté. Toutes les tavernes et toutes les auberges furent ouvertes pendant une semaine pour les pauvres gens. J?y suis allé. J?ai bu l?hydromel. Dans la bouche rien, dans les moustaches plein.