Balade n La ville de Djelfa s'étend sur des dizaines de kilomètres ; elle ressemble à une oasis de béton au milieu de la steppe. Les gens se meuvent tranquillement, déambulant à travers le vaste espace. Ce qui retient l'attention, c'est la simplicité des cafés, souvent pleins à longueur de journée. C'est leur aspect traditionnel. Plusieurs de ces établissements proposent des boissons chaudes préparées sur de la braise. Les gens discutent. «On n'a aucune distraction», affirme Djilali, approuvé par ses compagnons. Ni théâtre ni salle de cinéma, expliquent-ils pour justifier le grand nombre de personnes qui s'attablent dans les cafés pour «tuer le temps». La ville s'étire en longueur ; les immeubles beiges alignés comme une belle denture entretiennent, chez le visiteur, un sentiment de netteté. Les boulevards sont vastes, les arbres poussent timidement sur le bord de routes. Les automobilistes respectent le code, ne se pressent nullement ; le transport public existe à l'image des bus publics et privés et des taxis. Le centre-ville est un marché permanent. Toutes sortes de marchandises sont proposées : chaussures, lunettes, herbes, etc. Les Djelfaouis entretiennent un mystérieux rapport avec ces transactions commerciales ; une simple vente peut durer une demi-heure, c'est leur jeu favori. Ce qui retient l'attention c'est le grand nombre de personnes qui circulent toute la journée. Djelfa est un centre commercial et des gens y viennent d'Aflou et d'El-Bayadh. C'est le chômage, tente d'expliquer Ali, un Jijélien qui gère un bureau de tabac. Dans cette ville depuis trois ans, il s'est fait une place parmi les Djelfaouis, qui sont «des gens accueillants». Il regrette seulement, l'usage abusif de la drogue par les jeunes. Chose surprenante, Djelfa est aussi la ville des taxiphones. Ces derniers sont propres ; les prix sont affichés à l'intérieur des cabines, ce qui illustre l'honnêteté des gérants. Au nord de la ville, des bidonvilles ont fait leur apparition «pendant la période du terrorisme», dit-on. Pour éradiquer définitivement ce fléau, les autorités construisent, autour de ce bidonville, des immeubles pour le cerner. A chaque fois qu'un habitant bénéficie d'un appartement, sa baraque est immédiatement détruite. En circulant dans la ville inutile de demander à un Djelfaoui le nom des rues. Il répondra «trik el-bosta, trik la mairie»… Ainsi, les rues sont identifiées par les administrations mitoyennes. Curieusement, les femmes ne circulent pas dans les rues. Les Djelfaouis sont discrets. Les jeunes vivent sans grand tapage, se rencontrant dans des appartements privés, loin des yeux et des curieux, «sinon on va à Bou Saâda», une ville très convoitée. Curieusement, les Djelfaouis sont des couche-tôt et des lève-tard. Ce n'est qu'à partir de huit heures que les magasins commencent à ouvrir. Les gens gardent encore leurs habits traditionnels. Sans complexe, ils arborent la kachabia, la amama, le bâton à la main. Selon plusieurs témoignages, beaucoup de familles habitant la ville gardent encore les traditions de leurs aïeux ; elles possèdent une kheïma, quelque part au cœur de la campagne, où elles se rendent durant les week-ends et les vacances.