Cinéma n Le Grand Prix du 32e Festival du cinéma américain de Deauville a été attribué, dimanche soir, à «Little miss Sunshine» de Jonathan Dayton et Valérie Faris. Saluée unanimement par la critique, cette petite comédie indépendante, lauréate face à dix autres films en compétition, pourrait d'ailleurs être le succès surprise de la rentrée cinématographique. Grinçant, déjanté et souvent hilarant, Little miss Sunshine raconte le périple en fourgon vers la Californie d'une famille d'Américains (très) moyens, dont la fille de sept ans doit participer à un concours de beauté de «mini-miss». Le père (Greg Kinnear) a écrit un livre sur la «culture de la gagne», le fils est un adolescent misanthrope et fan de Nietzsche qui a fait vœu de silence, l'oncle est un universitaire homosexuel et suicidaire spécialiste de Proust, le grand-père est un vieil héroïnomane libidineux et la mère (Toni Collette) est dépassée par les événements. Greg Kinnear est un habitué des comédies loufoques et l'Australienne Toni Collette s'est fait connaître, il y a déjà quelques années, avec le film Muriel. Dans Little miss Sunshine, les gags et les situations cocasses s'enchaînent sur un rythme soutenu. Ce film peut rappeler par moments les œuvres de Todd Solondz (Happiness, Palindromes...), même si le propos est moins jusqu'au-boutiste et si la morale est sauve à la fin. «Cela a pris cinq années pour faire ce film. Le scénario a été présenté et refusé par tous les studios de New York et Los Angeles. Finalement, nous l'avons fait nous-mêmes. C'est ce genre de cinéma qui me fait aimer le film indépendant : divertir, toucher avec le cœur en espérant qu'il change la vie de certains spectateurs», a expliqué Marc Turtletaub, l'un des producteurs, en recevant le prix. «Le succès que ce petit film rencontre aux Etats-Unis nous prouve au moins deux choses : des acteurs formidables acceptent de travailler pour des sommes ridicules quand ils se sentent impliqués par le sujet, et le bouche à oreille à une importance extrême sur la vie d'une œuvre.» Half Nelson de Ryan Fleck a, quant à lui, fait coup double en raflant le Prix du Jury et le Prix de la révélation Cartier, nouvellement créé et présidé par le cinéaste Christophe Honoré. Ce long-métrage met en scène l'amitié qui se noue entre un jeune professeur de collège, idéaliste, mais paumé et toxicomane, et une de ses petites élèves noires de 12 ans qui vit dans un ghetto de Brooklin. Le film dresse un portrait sensible de l'enseignant (Ryan Gosling), brillant, mais à la dérive et qui fait tout pour éviter à sa jeune élève de tomber dans les pièges qu'il n'a pu éviter lui-même. De fréquents rappels des grands moments du Mouvement des droits civiques pour l'émancipation des Noirs américains dans les années 1960 apparaissent tout le long du film. Autre film a avoir obtenu une double consécration : Sherry Baby, le premier film de Laurie Collyer, s'est vu décerner le Prix du scénario et celui de la critique internationale. Il évoque le parcours d'une jeune héroïnomane sortie de prison où elle a passé trois années et qui, une fois sevrée, décide de tout faire pour regagner la garde de sa fille.