Tranche de vie n Les habitants ont entamé le jeûne avec les rituels habituels dans le respect des us et coutumes locales pour les familles désormais divisées en deux catégories : rurale et citadine. Les familles bédouines ayant gardé l'essence de la culture, des valeurs et des saveurs locales aiment vivre dans l'immensité des grands espaces du désert, au contact de leur cheptel camelin ou caprin. Ces familles, jalouses de leur héritage culturel, préparent bien à l'avance la semoule qui servira à la traditionnelle soupe, h'rira, ou encha comme l'appellent certains habitants des immensités désertiques. Durant la journée, dans les kheïmas, les femmes broient du blé jusqu'à n'en plus pouvoir sous la chaleur accablante du soleil. La farine ainsi obtenue servira à préparer la soupe, plat incontournable pour la rupture du jeûne. Les hommes, eux, préfèrent s'évader dans le profond désert pour faire paître leurs troupeaux, en général de chameaux ou de chèvres, loin de toute civilisation, ce qui procure une profonde quiétude et permet de se vider la tête des tentations provoquées par la vie en communauté ; d'autres se plongent dans la lecture du Saint Coran, un autre refuge de l'âme pour ces hommes qui, pour ce faire, s'abritent sous des tentes en toile de laine, en attendant la rupture du jeûne. La soirée venue, tous les hommes se retrouvent pour se livrer à d'interminables jeux de société, pendant que les femmes se donnent rendez-vous pour filer la laine en savourant du thé. Les meïdas, faisant office de tables pour le f'tour, sont chichement ornées dans les foyers. Les différentes senteurs qui s'en dégagent renseignent sur la réussite de la recette de la h'rira, une soupe onctueuse et épicée selon la région, ou de l'encha, une bouillie traditionnelle, ou encore d'el-hsa (un potage, spécialité de la région) qui sont les plats principaux dans la tradition culinaire tindoufoise. Le soir, le thé est préparé selon un lent rituel bien précis où seuls les initiés arrivent à saisir le sens des mouvements et leurs rôles dans la distillation des arômes. Chauffée sur un feu de bois, cette boisson constitue, pour les nomades de la région, un désaltérant incontournable. Quant aux Tindoufois citadins, ils se retrouvent dans le café du coin pour des parties de cartes ou de dominos, comme dans toutes les villes et villages du pays. Pour nombre d'entre eux, les veillées familiales ne sont qu'un lointain souvenir. En l'absence d'activités culturelles, les places publiques et les cafés constituent les seuls endroits où se réfugient les jeunes, avant de retrouver, avant l'aube, la maison familiale pour le s'hour.