Ecrit n «Le nouveau souffle du roman algérien», de Rachid Mokhtari est un essai sur la littérature des années 2000. Ce livre, selon l'auteur, qui est juriste, critique et écrivain se veut une continuité de son livre La graphie de l'horreur, un essai paru en 2003, et consacré à ce qui est communément qualifié de «littérature de l'urgence», une littérature puisant son essence dans le sang et l'horreur, c'est-à-dire dans la tragédie nationale. Dans ce présent livre, «l'auteur explore et décortique avec minutie cette transmutation du verbe dans le concept de l'écriture romanesque algérienne». Certes l'essai apparaît, a priori, comme un prolongement de ce chemin littéraire entrepris par nombre d'écrivains, mais il constitue, d'emblée, un moment de rupture des anciennes pratiques littéraires, autrement dit, le souci du critique est de révéler une nouvelle génération d'écrivains, tous animés par cette préoccupation de quêter sur une nouvelle thématique, une poétique récente et exaltée, et une esthétique aspirée et actuelle ; en somme, des écrivains soucieux d'innover et cherchant de nouveaux modes d'énonciation. «Dans cette analyse, j'ai rompu avec la tradition de la critique littéraire qui s'est arrêtée aux fondateurs du roman moderne maghrébin tels que Mouloud Feraoun, Mohammed Dib, Mouloud Mammeri etc.», a indiqué Rachid Mokhtari ajoutant : «Pour moi, ces fondateurs sont toujours là. Ce sont des repères mais il existe bien non pas un héritage littéraire mais des ruptures par rapport aux fondateurs et c'est ce que j'ai voulu montrer».Et de dire aussi : «Dans cette essai, nous nous sommes intéressés à la production romanesque du début des années 2000, de jeunes écrivains qui, pour la plupart, ont inauguré leur plongée dans l'écriture romanesque (…)», a-t-il expliqué. Et d'ajouter : «Chacun a une individualité esthétique, c'est-à-dire dans la manière de construire le texte», a-t-il dit. Ainsi, Rachid Mokhtari s'emploie à analyser avec un esprit critique cette mutation à travers une panoplie d'auteurs, à l'exemple de Nassira Belloula, Moustapha Benfodil, Sliman Aït Sidhoum, Nadjia Abeer, Nadia Sebkhi… ; il propose des lectures de cet imaginaire littéraire et au travers duquel se projette, comme sur un écran, la société algérienne, une société en pleine mutation. Ce qui caractérise d'emblée cette nouvelle écriture, c'est bien le personnage ; celui-ci apparaît comme un anti-héros, en décalage avec son «aîné», et évoluant curieusement dans un univers insalissable, opaque et déroutant, un monde oscillant tantôt entre réalité, tantôt entre illusion et d'autres fois entre fantasmagorie. Ces écrivains nouvellement venus à la littérature et qui ne sont pas représentatifs et qui sont issus d'horizons divers font voir, selon le critique, des personnages horribles, démoniaques, destructeurs, monstrueux qui, extirpés des réalités tragiques, opèrent par la satire et la dérision, le délire et le sarcasme. Mais en réalité un discours qui n'est qu'un métalangage qui est déployé et développé dans cette nouvelle écriture ; c'est-à-dire par la dérision et le grotesque que se dit la vérité sociale, et cela dans sa dimension politique et culturelle.