Drame n Expulsée d'un logement occupé depuis treize ans, une famille, avec un bébé de dix jours, se retrouve à la rue dans la localité de Sghirat. Sghirat se trouve à quelques kilomètres du chef-lieu de la wilaya, en bord de mer. La cité des 100-Logements de l'Eplf Boumerdès est composée de pavillons. Elle est, en apparence, un havre de paix. Pourtant, ce quartier a été le théâtre, en cette matinée du 15 novembre, de l'expulsion manu militari d'une famille — avec un bébé de 10 jours — qui occupait la villa n°19 depuis 1993. L'ancien propriétaire de ladite villa avait installé Zahia, la mère de famille et ses 10 enfants dans ce logement. Ils fuyaient le terrorisme. Il leur avait délivré une attestation de gardiennage pour justifier leur présence sur les lieux auprès de l'Eplf, en 1998. A l'époque, le pavillon en question — un bungalow de trois-pièces cuisine avec toutes les commodités — était en cours d'achat. Zahia Bouretaâ pensait être à l'abri, du moins pour un certain temps. Au fil du temps, elle tisse des liens avec le voisinage. Elle fait la connaissance de Faïrouz, sa voisine, nouvellement installée avec sa petite famille. Les liens se resserrent au point de ne former plus qu'une famille. Lors du séisme du 21 mai 2003, Faïrouz, blessée, a perdu 11 membres de sa famille, dont ses 2 filles. Elle trouvera assistance auprès de ses voisins, les Bouretaâ. En 2004, la famille Bouretaâ a été surprise d'apprendre que ses voisins ont acquis «leur bungalow». Depuis, les relations entre les deux familles se détériorent. L'affaire arrive à la justice qui tranche en faveur du nouveau propriétaire, l'époux de Faïrouz. «Tout ce que j'ai bâti en treize ans est parti en fumée», dit Zahia, les larmes aux yeux. «Regardez, mes affaires sont dehors…» Effectivement, effets et meubles sont éparpillés, çà et là, entre l'ancienne demeure et le nouveau refuge de la famille Bouretaâ. «Un voisin a bien voulu nous dépanner en nous hébergeant dans la loge du gardien. Mes filles, ma belle-fille, son bébé de 10 jours et moi dormons dans la loge. Mes fils passent la nuit sous la tente», précise Zahia. La tente est installée près des effets et des meubles ; deux lits, des couvertures et des oreillers y sont entassés. Zahia se lance dans le récit du déroulement de l'expulsion : «L'huissier, accompagné de gendarmes, m'a intimé l'ordre de sortir. Je suis finalement sortie et lorsque je lui ai fait savoir que le bébé avait à peine 9 jours, il m'a menacée de le jeter dehors.» Aujourd'hui, Zahia interpelle les autorités locales pour lui trouver une alternative. «Au moins un chalet où je puisse réunir ma famille et surtout pour le bébé qui commence à être malade», a-t-elle demandé, en signalant que «les nuits sont froides en ce mois de novembre, l'air marin est humide et le refuge est temporaire». «En tant que sinistrée du séisme, je n'ai pas bénéficié de chalet à l'instar de mes voisins.» Zahia s'interroge sur cet état de fait sans trouver de réponse.