L?aveu Des policiers de Toronto interrogèrent Karla durant cinq heures. Ils lui apprirent qu'ils avaient relié les viols de Scarborough aux meurtres de French et Mahaffy. Karla ne parla pas aux enquêteurs, mais avoua à son oncle que Paul Bernardo était bien le violeur de Scarborough et l'assassin des deux adolescentes. Son oncle lui conseilla de prendre un avocat, ce qu'elle fit. Elle demanda à George Walker de la défendre et il accepta. Mais à mesure de ses nombreuses entrevues avec Karla, George Walker réalisa qu'elle n'était pas nécessairement l'innocente victime qu'elle voulait dépeindre. Cependant, il ne comprenait pas vraiment, à ce moment-là, quel rôle exact elle avait eu dans ses crimes. Il tenta alors de passer un marché afin de protéger sa cliente. Il chercha d'abord à obtenir une immunité totale en échange de la coopération complète de Karla. Mais il compris rapidement qu'il n'y parviendrait pas. Le 17 février 1993, Paul Bernardo fut arrêté et inculpé de 43 charges de viols et d'agressions sexuelles. Il avait pourtant essayé de brouiller les pistes en changeant de nom. Il s'appelait à présent Paul Teale. Le 19 février, la police fouilla la maison de Paul et Karla. Les enquêteurs saisirent rapidement une grande quantité de preuves. Ils emmenèrent tout, des canalisations des toilettes à l'évier de la cuisine. Ils découvrirent que Paul avait gardé le compte, par écrit, de tous ses viols à Scarborough et qu'il possédait des livres et des vidéos sur les déviations sexuelles, la pornographie et les tueurs en série. Ils trouvèrent également une courte vidéo montrant Karla en train de coucher avec deux prostituées, sous les encouragements de Bernardo. A la mi-février, l'avocat de Karla et Murray Segal, du bureau du procureur, parvinrent à un accord (un «plea bargain», en droit anglo-saxon), qu'ils rendirent public. Karla allait être condamnée à 12 ans de prison pour les deux victimes, Leslie Mahaffy et Kristen French. Elle pourrait être libérée sur parole au quart de sa peine si elle se conduisait bien. En échange, Karla s'engageait à dire absolument toute la vérité sur sa participation aux crimes et tout ce qu'elle savait sur eux. En mars 1993, Karla fut admise dans un hôpital psychiatrique pour une évaluation. On lui donna de lourdes doses de calmants. Elle trouva la force d'écrire une lettre à ses parents et à sa s?ur, Lori, où elle leur expliquait que Paul et elle étaient «responsables de la mort de Tammy». «Il m'a menacée physiquement et m'a abusée émotionnellement lorsque j'ai refusé», ajouta-t-elle. Cette image de femme apeurée et soumise était celle qu'elle allait toujours présenter par la suite. Le 28 juin 1993, son procès commença. Elle avait pris soin de se vêtir de façon «correcte» : un mois plus tôt, lors de sa première apparition devant le juge, elle était habillée comme une adolescente délurée et non une jeune femme de 23 ans. Toutefois, elle avait gardé le maquillage criant. Le rapport psychiatrique incarna la base du «plea bargain». Le psychologue de Karla, le docteur Malcolm, conclut que Karla «savait ce qui se passait mais se sentait totalement impuissante et incapable d'agir pour se défendre elle-même ou qui que ce soit d'autre. Elle était, selon moi, paralysée par la peur et, dans cet état, elle est devenue obéissante et s'est occupée d'elle-même». Le procureur Murray Segal, lui, lut, durant 25 minutes, une litanie d'agressions, de tortures et de viols plus choquants les uns que les autres. Selon les journalistes, «c'était un catalogue de dépravation et de mort». Les mères de Leslie Mahaffy et de Kristen French vinrent expliquer à la barre ce que la mort de leur fille signifiait pour leur famille. Elles pleurèrent plusieurs fois, et Karla, elle-même, essuya des larmes, alors qu'elle était restée impassible lors de la lecture du procureur. Sachant que la population allait protester contre le «plea bargain», le procureur Murray Segal choisit de faire une déclaration. «Pourquoi pas une peine plus lourde, à la lumière des ces actes abominables ? Parce que sans elle, la vérité sur ces affaires aurait pu ne jamais être connue. Plaider coupable est le signe d'un remords. Son âge, son casier judiciaire vierge, les abus et l'influence de son époux, et son rôle tout de même secondaire, ont été des facteurs plaidant en sa faveur. Elle ne commettra plus de crime.» En fait, l'accusation ne possédait pas (encore) réellement de preuves directes contre Bernardo et le témoignage de Karla était la meilleure preuve de la culpabilité du jeune homme. En quelque sorte, l'accusation «ne pouvait pas faire autrement». (à suivre...)