Mue n Daniel Ortega, victorieux au premier tour de la présidentielle au Nicaragua, a troqué son costume de guérillero sandiniste pour celui d'un prédicateur chrétien de «l'amour, la paix et la réconciliation». Le 25 février 1990 à cinq heures du matin au milieu du grand complexe sportif couvert de Managua à moitié vide, Daniel Ortega, les larmes aux yeux, reconnaissait sa défaite face à la libérale Violetta Chamorro, seul, face à quelques dizaines de journalistes. Il devenait le premier dirigeant révolutionnaire d'Amérique latine arrivé au pouvoir par les armes et à le quitter par les urnes. Têtu, il s'était juré d'y revenir par tous les moyens. Il n'avait d'ailleurs pas hésité à signer au Parlement un pacte avec le diable, l'ex-président de droite Arnoldo Aleman, aujourd'hui en prison domiciliaire pour corruption. Cette fois ce fut le troisième essai de l'ex-révolutionnaire marxiste, face à une droite divisée et malgré une dissidence au sein de son parti, après les échecs de 1996 et 2001 où il affrontait une droite unie sur un candidat. Derrière un discours lisse ponctué par des références à Dieu, au Christ, voire au pape, où l'idéologie marxiste n'a plus sa place, pas plus que les diatribes anti-impérialistes qui essaient d'imposer la couleur rose au drapeau rouge et noir des Sandinistes. A-t-il changé ? Agé aujourd'hui de 60 ans, il est devenu prudent et n'a d'ailleurs accordé aucune interview durant sa campagne. «Un tigre qui n'a pas changé ses rayures», dit cependant l'ambassadeur des Etats-Unis à Managua qui aura tout fait pour l'empêcher de gagner. Les Américains lui reprochent aujourd'hui ses relations avec le président vénézuélien Hugo Chavez, radical à leurs yeux, et ne lui pardonnent toujours pas d'avoir renversé le dictateur Anastasio Somoza en 1979 avec l'aide de Fidel Castro, son mentor. Pour eux, Daniel Ortega, comme à l'ère de Ronald Reagan qui organisait la «contra», reste un ennemi de la guerre froide. Fils d'un cordonnier, Daniel Ortega est né le 11 novembre 1945. Etudiant, il rejoignait le FSLN, dont il devenait l'un des dirigeants en 1967 avant d'être arrêté et emprisonné pendant sept ans. Après un séjour à Cuba, où se scellera son amitié avec Fidel Castro, il conduira la guérilla du FSLN à la victoire. Dans la foulée de son élection à la présidence en 1984, Ronald Reagan décidait de mettre sous embargo le Nicaragua et organisait la rébellion armée de la «contra» : une guerre civile avec un bilan de 50 000 morts.