Blida et Oran continuent d'être sous les feux de la rampe. Les procès des deux scandales financiers s'y poursuivent avec leur lot quotidien de révélations et un constat amer : l'argent du peuple a été détourné, et dilapidé allégrement et avec la plus grande facilité. Les auditions se succèdent et il faut espérer que les vraies responsabilités seront situées. Ainsi, à Blida, la séance d'hier a permis de lever le voile sur un pan important du «scandale du siècle» : les sommes faramineuses placées par les entreprises et organismes publics dans les caisses de la banque créée par Abdelmoumène Khalifa. Les pratiques auxquelles s'était livré ce dernier pendant cinq ans pour attirer des dépôts de fonds, ont été parfaitement illustrées par le passage à la barre de l'ex-P-DG de Digromed, une entreprise publique spécialisée dans la distribution du médicament. En confiant ses avoirs à El Khalifa Bank, Yacine Ahmed a fait perdre à sa société plus de 200 millions de dinars. Même si ce cadre, élu manager de l'année en 1999, a motivé sa démarche par le blocage des comptes de la société au niveau du CPA par les services des impôts, il n'en demeure pas moins que les nombreux privilèges et largesses dont ont bénéficié lui et sa famille, et que l'accusation n'a trouvé aucune peine à démontrer d'une manière formelle, font peser sur lui des doutes certains. Il est, d'ailleurs, poursuivi pour association de malfaiteurs et vol qualifié. Billets de voyage gratuits, des cartes de crédits Mastercard, des séjours tous frais payés en thalassothérapie, des crédits sans garantie, des méchouis à répétition, Abdelmoumène n'en finissait pas de graisser la patte à ses généreux dépositaires, selon les témoignages apportés lors des différentes auditions. Même le nom du P-DG du groupe Saïdal, pourtant non impliqué dans le scandale, a été cité comme étant l'un des tout premiers bénéficiaires des «cartes thalasso». Plus surprenant encore, le témoignage de ce steward de Khalifa Airways qui a affirmé avoir demandé et obtenu un crédit de 150 millions de centimes en plein vol et en moins de 45 minutes. A Oran, les révélations ne sont pas moins fracassantes, même si l'affaire jugée, avec ses «traites avalisées», ses «bons de caisse» et ses «escomptes» est considérée «plus technique», pour reprendre l'expression de Me Miloud Brahimi, un des avocats de la défense. C'est d'ailleurs pour cette raison que le ministère public est représenté au procès par un magistrat connu pour être un spécialiste des questions financières et bancaires. Les juges tentent toujours de comprendre comment la Banque extérieure d'Algérie a perdu plus de 1 300 milliards de centimes dans le scandale. L'audition d'hier d'un accusé, un ex-employé de l'agence BEA de Sig, a permis d'y apporter les premiers éléments de réponse. Ce dernier, qui a assuré l'intérim en l'absence du directeur parti en pèlerinage, aurait avalisé des opérations supérieures à 100 millions de dinars, en apposant sa seule signature, alors que la réglementation stipule que trois paraphes sont nécessaires pour ce genre d'opération. Une entorse qui a coûté à l'agence quelque… 345 milliards de centimes.