Depuis plus de quarante ans, peu de décisions sont prises à Souk Ahras sans concertation des lobbies décideurs ou relais qui arrivent, tant bien que mal, à asseoir leur autorité et imposer une troublante concomitance dans la gestion des affaires de la wilaya. Ce qui se passe peut être sérier ainsi : marché juteux, décidé depuis les hôtels d'Alger, nominations de complaisance à des postes de souveraineté, négociés au prix des privilèges, pressions sur les responsables de l'administration locale, instrumentalisation de la justice pour réprimer les partisans de l'anti-thèse, et museler les voix discordantes ou servir de récipient où sont diluées les grandes affaires traitées quotidiennement par les services de sécurité, tous corps confondus. Sur les 16 scandales, les plus en vue, seules les personnes les plus vulnérables ont connu la voie des tribunaux. Gravissime est la manière avec laquelle a été traité, lors de l'instruction judiciaire, le dossier de l'OPOW Badji Mokhtar, et ce de l'avis même du juge de la section pénale qui a déclaré solennellement lors de la plaidoirie : « Cette affaire est sans fondement ». Au lieu d'un ex-directeur, impliqué dans des irrégularités dans la gestion financière du complexe sportif entre 2001 et 2004, c'est le directeur placé en remplacement du responsable limogé qu'on accusera de détournement, sans admettre, à aucun moment, l'erreur jusqu'au jour de la plaidoirie. Sur les scandales multiples qui continuent à ébranler les banques de Souk Ahras, seule une personne a connu l'incarcération parce que, justement, sans nom protecteur et sans affiliation partisane. L'on tente vaille que vaille de minimiser la portée de la mauvaise gestion et de la dilapidation des deniers publics du côté des institutions hospitalières de Sédrata et de Souk Ahras, où le préjudice financier causé au Trésor public n'est pas des moindres. Idem pour le dossier accablant de la DJS, soumis à l'instruction pendant plus d'une année, et dont le procès vient d'être renvoyé au mois d'avril. Les supputations vont bon train quant au nombre réel des personnes qui s'y trouvent impliquées et ceux qui bénéficieraient encore du statut de nec plus ultra. L'Algérienne des eaux, la direction de l'urbanisme et de la construction (DUC) et l'agence foncière locale sont autant d'affaires abracadabrantes où l'on continue à se demander, d'abord, si la préservation de deniers publics fait encore partie des préalables moraux et, ensuite, si l'équité dans le traitement des dossiers serait au rendez-vous. L'affaire des couffins du Ramadhan, détournés par deux élus de l'APC de Souk Ahras, obéit encore aux tergiversations des instances judiciaires locales qui appréhendent encore une attaque frontale au parti de Belkhadem, détenteur, de surcroît, du portefeuille de la tutelle des magistrats locaux. Un magistrat, installé à Alger, y a mis son grain de sel pour transformer en simple fait divers un détournement d'envergure, puisque la valeur des aliments disparus est de l'ordre de plusieurs millions de dinars. D'aucuns se demandent, à juste titre, si la justice est souveraine à Souk Ahras, où l'on peine, malgré le nombre record des scandales financiers, à rencontrer un gros calibre devant le parquet. L'institution a plus d'un tour dans sa besace pour dissuader ceux qui en demandent trop.