Résumé de la 4e partie n Franco Garibaldi décrit son voisin comme une personne bizarre qui fourre son nez partout. Franco examine encore le système, et répète : — Pas son fort... ce genre de truc... ou alors il avait la notice. Le commissaire Anselmi entraîne Franco hors de la cuisine et fait signe à un policier de le conduire à l'hôpital. Penché une seconde à la portière de la voiture, il demande : — C'est vous qui auriez dû rentrer le premier en principe ? — Oui. D'habitude je rentre avant ma femme. — Merci. Cette façon de poser des questions abruptes est une spécialité du commissaire Anselmi. Il compte beaucoup sur cette technique. Elle ne laisse pas le temps au témoin de réfléchir et, parfois, c'est intéressant. Mais en ce qui concerne Franco, le résultat semble l'innocenter. Au tour du voisin. Portrait fidèle. Petit, chauve, rond et mou. Il se déplace avec précaution, comme si le sol était miné. Il roule des yeux de veau mâtinés de serpent, dans tous les sens. Peut-être en a-t-il effectivement derrière la tête... Les mains moites se frottent sans arrêt l'une contre l'autre. Les doigts boudinés ne serrent pas la main du commissaire, ils l'effleurent. La voix chuchote, précieuse. Les phrases sortent d'une bouche ronde et rose, ampoulées... susurrantes : — Ce n'est un secret pour personne... Franco a une maîtresse en ville. Il ne s'en vante pas, mais tout le quartier est au courant... — Tout le quartier c'est vous, monsieur ? — Oh je sais... il a dû me traiter de pipelette, ou de Dieu sait quoi d'autre... mais n'empêche... cette femme est l'épouse d'un conseiller municipal, un communiste ! Vous vous rendez compte ? — De quoi dois-je me rendre compte ? — Franco fait partie de la démocratie chrétienne !... Et ce n'est pas tout, pour m'exprimer vulgairement, si vous le permettez…. le «cocu»… doit le savoir. Je suis sûr qu'il sait ! Seulement il ne dit rien, et savez-vous pourquoi il ne dit rien ?... Je vais vous le dire, moi... Parce que ça l'arrange. Il dirige une entreprise de travaux publics, et Franco, lui, dirige les services de la voirie... Vous me comprenez ? Le commissaire examine le salon où le reçoit le voisin, des coussins, des coussins et encore des coussins... des tapis et encore des tapis. Des rideaux de soie, des lampes, et trois chats siamois, aux yeux obliques, inquiétants d'immobilité. — Dites, monsieur, pourquoi, selon vous, monsieur Garibaldi aurait-il voulu tuer sa femme ? — Ah, je n'ai pas dit ça... je n'ai pas dit ça... Les doigts boudinés s'agitent, le corps mou s'affale sur les coussins mous. — Comprenons-nous... commissaire. Franco n'a pas besoin de tuer sa femme. Vous voulez que je vous dise ? Il s'en fiche ! Elle rampe devant lui, que c'en est écœurant... Il est d'une autorité ! Un vrai macho... Et elle est prête à tout avaler... Hier encore, tenez, il lui a fait croire qu'il allait à une séance de travail à la mairie... Pas du tout ! Pas du tout ! C'était du bidon... Il est allé dîner avec sa maîtresse, en ville, à une terrasse. — Vous l'avez vu, je suppose ? — Je l'ai vu... — Vous voyez tout en somme ? — Vous savez, commissaire, dans la vie, il faut se méfier... toujours se méfier... La preuve, tout peut arriver... Les yeux mi-veau mi-serpent font un tour complet dans les orbites. Cet homme est un paranoïaque. Simple. Délire de persécution, curiosité maladive... et probablement hypocondrie. Sur la table basse qui trône au milieu des coussins empilés, une théière, une tasse, et des boîtes de pilules de toutes les couleurs... (à suivre...)