Parution n Le roman raconte une Algérie qui s'affranchit de la France avant de rompre définitivement avec elle. Le café littéraire qu'organise la Bibliothèque nationale a accueilli, hier, Mohamed-Lakhdar Maougal, critique et universitaire, et Hamid Abdelkader, journaliste (El-Khabar) et écrivain pour présenter conjointement le nouveau roman de Mouloud Feraoun, La cité des roses, paru à titre posthume aux éditions Yamcom. Une présentation faite tantôt en français tantôt en arabe, deux lectures complémentaires qui donnent un aperçu sur le texte. «Parler de ce livre, c'est fêter un roman exceptionnel», a dit Amin Zaoui, directeur de la Bibliothèque nationale. Et d'ajouter : «Sa sortie, donc sa publication après 50 ans d'oubli, de silence est un événement.» «Quand j'ai lu le texte, ça m'a renvoyé aussitôt à sa trilogie, tant le style est simple et direct, poétique, profond et à plusieurs orientations sémantiques», a-t-il poursuivi. Et de souligner aussi que «c'est un roman d'histoire, l'histoire de l'Algérie qui est dite à travers l'histoire de l'individu. C'est un roman plein d'émotion, d'amour, d'images et de symbole.» Mohamed-Lakhdar Maougal a, pour sa part, souligné que le roman oscille entre deux mouvements, entre l'écriture romanesque et l'écriture théâtrale. C'est-à-dire que le texte renvoie à un référent, celui de la cité, d'où le titre, un lieu qui, dans la tragédie grecque, se révèle comme l'accomplissement d'un drame : «L'amour et la mort traversent, de bout en bout, le roman, ils le ponctuent, même si la mort ne semble pas focaliser sur les personnages», a relevé l'orateur. La cité dont il est question dans le roman est «un lieu de réclusion, de misère, de détresse», a-t-il indiqué. Et de dire aussi que les trois premiers romans de Mouloud Feraoun sont des romans ruraux, mais le dernier, qui se distingue des précédents, est un roman urbain. Le roman, s'étale sur une durée de trois années, allant de 1957 à 1960 s'inscrivant dans un contexte historique particulier, à savoir la fin de la bataille d'Alger et l'avènement (en France) de la Ve République qui augura une nouvelle voie. Celle-ci concerne la Guerre d'Algérie, puisqu'en 1962, elle aboutira à l'indépendance de l'Algérie. Le roman raconte donc une Algérie qui s'affranchit de la France avant de rompre définitivement avec elle. Mouloud Feraoun dresse, ici, «un tableau sans concession de la passion enivrante qui lia les deux pays et dont les spectres heurtent encore aujourd'hui» les deux sociétés, les deux peuples. Cette tragédie est illustrée à travers une relation, un amour entre un directeur d'école, un Algérien, et une institutrice, une Française. La cité des roses est une histoire de rapprochement, d'éloignement et, plus tard, de rupture. Ainsi, Hamid Abdelkader a indiqué que ce roman diffère de la trilogie (Le fils du pauvre, La terre et le sang et Les chemins qui montent) de par le tempérament et le caractère. «Dans la trilogie, explique l'intervenant, Mouloud Feraoun prend une position contre le colonialisme. Or dans La cité des roses, l'écrivain esquisse, à travers ces deux personnages, une tentative de rapprochement et d'assimilation. Il tente de considérer à l'indépendance la société algérienne avec toutes ses composantes : pieds-noirs et Algériens. Il se trouve que le rapprochement n'aboutit pas. D'où la rupture entre le directeur et l'institutrice. Ainsi, la relation s'avère illusoire. Illégitime, elle se révèle impossible.» La cité des roses, est-il écrit dans la préface, est «un roman d'amour, d'une assourdissante vérité, venant sans conteste parachever son œuvre», celle de Mouloud Feraoun.