Sentence n «Djamel Guellimi ... le tribunal vous condamne à la peine de 15 ans de prison ferme et une amende de un million de dinars», déclare Mme la juge. L'ex-directeur de Khalifa TV contre lequel le procureur général avait requis 20 ans ne peut plus se tenir sur ses jambes, pourtant solides lorsqu'il était joueur à Beni Messous. Un lourd et interminable «ouahhhhh» traverse la salle. C'est la peine la plus lourde prononcée jusque-là. Juste avant la sentence, l'ancien bras droit de Abdelmoumen, accusé entre autres «d'association de malfaiteurs», faisait basculer sa tête comme étourdi, tantôt à gauche, tantôt à droite. Sidéré, laminé, il passe une éternité avant que le policier ne le fasse sortir par une petite porte. Derrière ses grandes lunettes, Mme Brahimi continue de lire le verdict en arabe dans le micro, après avoir rappelé l'assistance à l'ordre. La salle d'audience est comme une cocotte-minute. Mourad Issiridir passe à la barre. «12 ans de prison ferme». Lui non plus n'en revient pas. Chétif dans son costume noir, l'ex-directeur de l'agence BDL, jugé coupable d'avoir attribué frauduleusement un crédit-bail à Abdelmoumen, sort la tête baissée, les deux mains couvrant un visage meurtri. Dans une rangée, une femme d'un certain âge s'est évanouie soudainement. C'est son épouse. On l'a fait sortir précipitamment au moment où le chahut s'installe à nouveau. Encore une fois, la juge demande silence. Maintenant, C'est au tour de Youcef Akli, un quinquagénaire aux épaules larges. Accusé lui aussi «d'association de malfaiteurs», le caissier principal de Khalifa Bank écope de 10 ans ferme et une amende de un million de dinars. Les frères Chaâchoua passent à leur tour devant la juge. Abdelhafid, directeur-adjoint, chargé de la sécurité, se voit lui aussi condamné à 10 ans. Quelques instants plus tard, son frère connaîtra un sort similaire. Totalement effondrés, les parents Chaâchoua, nombreux dans la salle, faisaient pitié aux présents. Encore des évanouissements. Omar Rahal, le vieux notaire, ancien ami de Khalifa père, s'approche doucement devant la juge quand celle-ci prononce son nom. Parmi les 104 accusés, entre crimes et délits, il est le seul à avoir bénéficié des circonstances atténuantes. Mais pas suffisamment pour échapper à dix ans de réclusion criminelle, lui contre qui le procureur avait requis précédemment 18 ans d'emprisonnement. Les dix ans tombent comme un couperet comme sur sa femme, une vieille dame vêtue d'un tailleur vert qui n'a pas cessé de maudire le sort dès la prononciation du verdict. Comme les autres femmes abattues, elle reçoit consolation et encouragement. «Elle croyait dur comme fer que son mari allait s'en sortir, vu son âge avancé», dit une avocate. «L'erreur n'a pas d'âge maître !», lui répond stoïquement un inconnu.