Résumé de la 6e partie n Les témoins de l'accusation désignent Sacco et Vanzetti comme les auteurs du hold-up sanglant de South Braintree. L'avocat de la défense, Moore, se perd dans les détails. L'audience qui suit, va être consacrée aux rapports des experts en balistique. La vedette du jour est le capitaine Proctor, policier connu qui, à un âge avancé, s'est spécialisé dans les armes à feu, lisant pratiquement tout ce qui s'écrit sur le sujet et ayant réalisé de nombreuses expériences. Dans le premier procès, celui de Vanzetti, il a déjà examiné l'arme et les balles trouvées en possession de l'accusé et il a déclaré qu'elles sont du même type que les douilles ramassées sur le lieu de l'attaque, ce qui a permis de faire condamner Vanzetti à douze années de prison. Aujourd'hui, il s'agit d'en savoir davantage sur les balles qui ont tué les deux convoyeurs de South Braintree. Tout le monde, dans la salle, retient son souffle quand Proctor est appelé à la barre. Les douze jurés regardent d'un œil curieux l'homme qui avance ; ils savent, comme tous les autres, que l'issue du procès tiendra à ses déclarations. Proctor va rappeler qu'il a été le premier à examiner les douilles retrouvées sur les lieux du crime ainsi que les balles retirées des corps des victimes et des armes des accusés. Il commence par dire qu'il est très familiarisé avec le type d'arme que possèdent Sacco et Vanzetti, des calibres 32 et 38. Par ailleurs, il a une méthode pour reconnaître les rainures que laisse une arme sur une balle : elle consiste à pousser la balle avec le doigt dans le canon et on obtient les rainures. «Je vais le faire devant vous, avec le pistolet de Sacco», dit-il. Il introduit une balle dans le canon et la pousse avec le doigt, mais la balle refuse d'entrer. Proctor s'énerve, mais n'y parvient pas. «Habituellement, ça se passe bien, dit-il, mais aujourd'hui ça ne marche pas. De toute façon, on peut se passer ici de cette expérience !» Il explique ensuite qu'il a eu recours à une autre expérience : il a tiré, avec le pistolet de Sacco, dans un coffret rempli de sciure de bois qu'il a humectée d'huile et il a comparé ces balles à celles du hold-up. Conclusion : seule la balle qui a tué le convoyeur Berandeli, la fameuse balle marquée III, a été tirée par le revolver de Sacco. «Et les douilles retrouvées près du corps ?, demande le président. — La douille marquée de la lettre W vient d'un revolver, les trois autres d'une autre arme. — Et cette douille marquée W, provient-elle d'une balle tirée du revolver de Sacco ?» Tout le monde retient son souffle. Chacun sait que de la réponse de l'expert dépendra la suite du procès. «La marque laissée sur la douille W, dit-il, et celles qui figurent sur les balles tirées avec le pistolet de Sacco sont compatibles, à supposer que la balle de la douille W ait été tirée avec l'arme de l'accusé.» Il y a un brouhaha dans la salle. Le président menace, si le calme ne revient pas, de faire évacuer la salle et de continuer le procès, à huis clos. Le silence revient aussitôt. Un deuxième expert, Charles Van Amburgh, est appelé à la barre. (à suivre...)