Les chiffres sont alarmants : pour de multiples raisons, des centaines de milliers d'enfants algériens sont contraints de travailler et souvent pour un salaire de misère. «Nous savons que ces chiffres sont loin de refléter la réalité. Si nous ajoutons à ces 300 000 les enfants domestiques (qui travaillent à la maison ou chez des gens), et en intégrant tous les critères établis par le Bureau international du travail pour essayer de recenser effectivement le travail des enfants, je crois qu'on atteindrait facilement le million de travailleurs enfants en dessous de quinze ans», affirmait ce matin à la chaîne III, Abdallah Mekki, directeur exécutif à la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem). «Le travail des enfants, il faut le mettre en relation avec la situation socio-économique des populations. Il y aurait en effet environ 1 360 000 enfants totalement démunis». Quant aux principales raisons qui poussent ces enfants à prendre le chemin du labeur au lieu de celui de l'école et des jeux, elles sont principalement liées à la situation familiale «ce sont les parents directs qui poussent leurs enfants à travailler, très souvent pour des raisons socio-économiques désastreuses. Parfois c'est l'absence permanente ou le décès du père. Donc l'enfant se sent responsable de sa famille. Il y a aussi comme facteurs, la pauvreté, l'analphabétisme, la question du sous-développement rural. Les conditions de vie de quartier peuvent être une raison pour laquelle les enfants vont travailler», énumère M. Mekki avant de conclure : «Les raisons sont multiples. Quand la pauvreté atteint des niveaux graves, l'enfant est plus exposé à ces situations.» Mais le problème ne se situe pas seulement au niveau de l'enfant ou de sa famille. Le gros de l'affaire se situe au niveau du recruteur. «Les citoyens n'ont aucune retenue à employer un enfant», s'indigne l'orateur qui explique cet état de fait par les avantages malsains qui motivent les gens. «Lorsqu'on utilise un enfant, on peut ne pas lui donner le salaire minimum, on peut l'exploiter comme on veut parce qu'il n'est déclaré nulle part. En fait il est en situation d'esclavage.» «C'est important de reconnaître les droits de l'enfant avec ses plaisirs, ses loisirs, ses cris, ses joies..., c'est reconnaître que nous sommes dans une civilisation qui respecte l'être humain d'une manière générale.» M. Mekki rappelle que l'Algérie «a ratifié la convention internationale sur les droits de l'enfant et il est évident qu'à partir du moment où une convention est ratifiée, elle est appliquée au niveau du droit algérien». Il demande enfin au nom de la Forem l'instauration d'un code de l'enfant «c'est-à-dire rassembler l'ensemble du corpus juridique pour en faire un statut de l'enfant afin de garantir les mêmes règles partout» ainsi qu'à l'instauration d'un observatoire de l'enfant. Par ailleurs, il mise beaucoup sur une nouvelle loi pour la protection de l'enfance, «il y a une loi qui est en préparation et qui doit être discutée dans le nouveau Parlement».