Portrait Réda n?a que 21 ans, c?est un étudiant en troisième année à l?université d?Alger. Tôt le matin, il place sa minuscule table qui déborde de paquets de cigarettes, au marché communal de Réghaïa. Toutes marques se confondent ici, algériennes ou européennes. «Les Marlboro à 70 DA, la chéma à 30 DA, ou trouverez-vous ces prix ?» Réda connaît l?itinéraire et tout le trafic par lequel passe sa marchandise avant d?arriver entre ses mains. «Un groupe d?hommes, qu?on appelle les grossistes, activent dans ce marché. Ils traînent souvent ici. Il faut avoir de solides liens avec eux, car ce n?est pas facile de les approcher.» Les vendeurs peuvent leur passer commande de toutes sortes de marchandise. Parfois ce sont ces «grosses têtes» qui proposent la leur, ce qu?il y a sur le marché, ce qui marche le plus. «Mes cigarettes proviennent du Sahara et des frontières. Les trafiquants usent de différentes ruses pour les faire parvenir. Souvent, ils transportent cette marchandise dans les bus, pour éviter les fouilles, ils distribuent quelques paquets à des citoyens, pour la leur faire passer. En échange, ils leur remettent un ou deux paquets. Ces gens n?ont rien à perdre. Les contrebandiers cachent parfois leurs marchandises dans les citernes de mazout des camions ou les enfouissent dans le sable, qu?ils transportent. Les gendarmes ne pensent même pas à les contrôler.» Notre interlocuteur, ajoute que certaines cigarettes ne proviennent pas de la Snta, mais d?autres institutions où elles sont livrées à bas prix aux travailleurs. A leur tour, ils revendent les cartouches à des acheteurs qui mettent le contenu dans d?autres boîtes. «Des Rym dans des Marlboro, ça ne se voit pas du tout ! Et ça se vend !». En revanche, les boîtes de cigarettes étrangères, telles American Light ou Les Gauloises restent intactes. Le papier à chiquer «Massa» est aussi trafiqué. «Le vrai papier est glacé.». La mafia ne laisse rien au hasard. Parfois, c?est un ancien stock de cigarettes qui est proposé, les citoyens achètent et ne se méfient pas. Notre jeune Reda précise que souvent il est victime de la saisie de sa marchandise. «L?argent achète tout ici, si j?ai une marchandise de 14 millions, je donne 2 millions et je suis tranquille.»