L'élément de couleur de la peau est omniprésent dans notre culture et dans la vie affective. Les familles issues du nord du pays acceptent mal d'avoir une bru ou un gendre de couleur noire, voire un basané issu du sud. Les quelques couples d'exception qui ont fait ce choix ont été contraints de supporter, pendant longtemps, les commentaires agressifs des membres de la famille. Devant cette réalité et l'absence d'un processus efficace d'intégration des populations du sud dans le mouvement de développement du pays, on est en droit de se demander quelle serait la réaction de la société algérienne si un jour un candidat de couleur noire se présentait à l'élection présidentielle. «Ce n'est pas politiquement organisé. La couleur de la peau n'a aucune importance sur le plan politique. C'est à un niveau beaucoup plus personnel, car la société algérienne est structurée de telle manière que la couleur de la peau a son importance. Au sens affectif, la société est composée d'une population à dominance blanche. Mettre un homme de couleur, aussi compétent soit-il, à la tête du pays, constituerait sans doute un choc pour l'algérien d'aller voter», répond Mohamed Saïb Musette, maître de recherche au Cread. Il s'agit d'un choc «beaucoup plus affectif. Ce n'est pas le refus de l'autre, mais cela ne cadre pas avec sa conception de la vie et de la famille. Et c'est un phénomène qui se répète à tous les stades de la vie», ajoute-t-il. Pour lui, le phénomène n'est pas institutionnalisé comme tel, c'est l'organisation sociale qui est structurée de cette manière. «La formation sociale algérienne est organisée en clivage de type anthropologique. L'école aurait, toutefois, pu jouer un très grand rôle contre la discrimination.»