Portrait n Mme Zahia B. a grandi et étudié dans une grande ville. Agée de 39 ans et mère de 4 enfants, elle a appris à préparer le pain traditionnel après son mariage dans une localité rurale à El-Khemis (Aïn Defla), puis à Sidi Rached. «Grâce à mon mari connaisseur en matière de céréales j'ai appris l'importance du pain naturel», nous dit-elle tout en continuant à pétrir. N'utilisant aucun additif, ni aucun produit chimique, elle prépare le levain. «D'habitude je prépare le levain à l'avance pour 2 ou 3 utilisations. Je prépare celui-là juste pour vous donner une idée», dit-elle Elle a appris à fabriquer du pain à base d'orge, de grain concassé qu'elle préparait elle-même traditionnellement ou qu'elle envoyait au moulin si les quantités de blé étaient trop importantes. Aidée de ses deux sœurs Hania et Kheira, Zahia trie ce blé. «J'ai appris beaucoup d'expressions telles que la moutarde des champs, la kohaila — qui est une mauvaise herbe qu'on peut trouver dans le blé. J'ai même appris à suivre le processus de préparation du pain traditionnel en partant du blé pour arriver au pain prêt à la consommation. Le son est pilé dans un mortier en bois ou à l'aide d'un sceau d'eau en fer vide puis passé à la meule». Mme Zahia veut communiquer tout ce qu'elle connaît. «L'orge une fois bien tamisé, est pétri avec son son (n'khala) qui est généralement utilisé pour les problèmes rénaux. Quant à el-hamdha ou khobz ch'air, il est préparé avec de la semoule d'orge à laquelle on ajoute une goutte de citron. Vous remarquerez que tout est utilisé, rien ne se jette.» «J'ai commencé à vendre mon pain à un voisin restaurateur, pour aider mon mari» reprendra-t-elle. «J'ai la chance d'avoir un mari connaisseur en matière de produits agricoles puisqu'il est lui-même ingénieur agronome. Il m'a appris les bienfaits de chaque produit alimentaire depuis notre mariage il y a 15 ans, alors que je n'y connaissais rien en agriculture.» Mme Zahia prépare jusqu'à 50 pains par jour pour les revendre au restaurateur et à l'épicier près de chez elle. Pendant le ramadan, ce restaurant lui commande au moins 30 pains d'orge (el-hamdha). «Dans ma famille nous n'avons jamais eu de problèmes d'estomac car nous consommons diététique et naturel y compris le pain.» Nous avons fait un saut au restaurant «Saâda» géré par un très jeune homme. Le pain fait maison y est disposé dans des paniers. Le propriétaire, Boualem Bouhendir nous apprend qu'il a ouvert voilà 3 ans. Il a des clients qui viennent déguster sa spécialité de poulet grillé à la braise accompagné de pain traditionnel. «On propose le pain ‘'normal'' (blanc) mais les clients commencent à exiger le pain traditionnel f'tira, khobz koucha ou tadjine. Ce pain est plus demandé que la baguette. Moi je préfère le pain de blé dont je suis un grand consommateur. Il me convient parfaitement», nous dira-t-il. Le pain traditionnel se vend bien en été. Selon Boualem, il est très apprécié par ceux «qui prennent leurs repas chez moi avant d'aller à la mer». C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a été obligé d'engager durant la saison estivale 5 autres femmes au foyer pour lui préparer du pain maison. «Ce sont généralement des femmes démunies que j'embauche en priorité et elles font du bon pain.»