La société algérienne est appelée à traîner longtemps encore les séquelles d'une décennie sanglante qui, en plus d'avoir fait des centaines de milliers de morts, a occasionné des traumatismes psychologiques en particulier aux enfants. Un million d'enfants sont traumatisés par des violences qu'ils ont subies ou auxquelles ils ont assisté durant la décennie du terrorisme. C'est le chiffre qu'a tenu à réitérer hier le président de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et du développement de la recherche médicale (Forem). Le professeur Mustapha Khiati, qui ouvrait le troisième séminaire national sur les enfants victimes de la violence, hier, au centre de soins psychologiques de Bentalha, a rappelé que ce chiffre ne contredit pas les estimations fournies par le ministère de la Santé qui estime que 20 % des enfants des régions touchées par le terrorisme sont traumatisés (Saïda, Bouira, Blida, Sidi Bel Abbes, Chlef, Jijel…). Ce qui équivaudrait, selon le Pr Khiati, au nombre défendu par son organisation, c'est-à-dire environ un million d'enfants, même si, de l'avis même des autres spécialistes qui ont eu à intervenir lors des débats, il est extrêmement difficile de dresser des statistiques fiables sur les enfants réellement touchés du fait que de nombreuses victimes de chocs et de traumatismes ne sont pas signalées aux centres de soins et aux autorités compétentes. Le Dr Makour, maître de conférences en psychologie à l'université de Blida abonde dans le même sens et affirme que de nombreux parents de victimes n'arrivent pas à admettre que leurs enfants souffrent de traumatismes et de séquelles psychologiques pour des raisons liées au regard que porte la société sur ce type d'état psychologique qui est le plus souvent apparenté à des affections relevant de la psychiatrie. Le séminaire qui a eu lieu hier, coïncide avec le dixième anniversaire des douloureux événements de Bentalha où des centaines de citoyens ont été massacrés par balles et à l'arme blanche dans la nuit du 23 septembre 1997. C'est d'ailleurs à la suite de ce massacre que l'organisation non gouvernementale présidée par le Pr Khiati a décidé d'ouvrir un centre sur le lieu même de l'horreur pour venir en aide aux enfants rescapés du massacre et des autres attentats terroristes qui ont eu lieu dans la région. En mars 1998, un citoyen de la localité a consenti à mettre gracieusement sa maison à la disposition de la Forem pour l'installation des structures du centre de soins. Depuis, des équipes de psychologues se relayent en permanence pour soulager les souffrances des enfants qui viennent de tous les quartiers de la capitale. Plusieurs études, présentées par d'éminents spécialistes à l'occasion de ce séminaire, avaient trait à l'évolution de l'état psychologique de la personne traumatisée. La plus remarquable est celle effectuée par les psychologues du centre de Bentalha qui suivent les pensionnaires depuis une dizaine d'années.