Passion n Les critiques assimilent Biyouna à l'un des curieux personnages d'Almodovar, ou encore à l'une de ces égéries troublantes que l'on croise dans les vieux films de Fassbinder. Elle est grande, mince, brune. Ses cheveux noirs et fournis se déroulent sur ses épaules. Elle est drôle, plaisante, liante. Elle est naturelle, directe et d'un caractère franc, mais elle peut être, par moments, caustique. Elle est aussi provocatrice. Elle a une voix éraillée et charmeuse. C'est ainsi que l'on décrit Biyouna, l'icône et de la télévision et du cinéma algériens. Très tôt – à l'âge de 17 ans – elle débute dans la chanson, car, elle ne cesse de le dire : «Très jeune, je fus habitée par la passion du chant.» Ainsi, elle fait partie de plusieurs troupes, d'abord celle de Fadéla Dziria où elle assure les chœurs en jouant du tambourin, puis d'une autre qu'elle dirige avec sa complice Flifla, enfin la sienne où elle est chanteuse principale et devient aussitôt une animatrice réputée des mariages. Chanteuse ensuite dans plusieurs cabarets d'Alger, avant d'être danseuse, à l'âge de 19 ans, au Copa Cabana. Chanteuse, danseuse, Biyouna est aussi actrice – et plus tard comédienne des planches. Elle joue dans El Hariq (l'incendie), un feuilleton adapté du roman de Mohammed Dib, La grande maison, par Mustapha Badie, la rendra célèbre. De la télévision, elle passe ensuite au grand écran : elle tourne, à l'époque, deux films : Leïla et les autres de Sid Ali Mazi (1978) et La voisine de Ghaouti Bendedouche (2000). Elle se produit également dans plusieurs one-woman-show. Mais, c'est à la télévision – surtout avec le sit-com Nass Mlah City – que les Algériens la redécouvrent et l'apprécient à sa juste valeur artistique. Ils apprécient son jeu, son humour et notamment son naturel, voire sans franc-parler, son attitude libre, excentrique et son caractère exubérant. Tout le monde l'apprécie parce qu'elle met le public à l'aise, parce qu'il voit en elle l'authenticité. Les critiques l'assimilent à l'un des curieux personnages d'Almodovar, ou encore à l'une de ces égéries troublantes que l'on croise dans les vieux films de Fassbinder. C'est grâce à Nadir Moknèche que Biyouna revêt cette étiquette. En 1999, le réalisateur lui offre un rôle dans Le harem de madame Osmane qu'elle tourne en France. C'est à ce moment-là qu'une amitié est née entre l'actrice et le réalisateur. Entre-temps, et en marge de sa nouvelle carrière cinématographique, Biyouna renoue avec sa première passion, elle renouvelle son aventure musicale : en 2001, elle rencontre le jeune compositeur français John Bagnolett, avec qui elle signe un répertoire, Raid Zone, où elle épanche abondamment son blues. En 2003, Nadir Moknèche lui propose un second rôle dans Viva l'Adjérie. Plus tard, et après sa participation au spectacle de Fellag Opéra de Casbah mis en scène par Jérôme Savary, elle signe un nouvel album, Une Blonde dans La Casbah, qui connaît notamment en France un franc succès. Un répertoire façon cabaret, richement servi par des arrangements aux délicates incrustations de piano, de violon et de cuivres, de guitare et de mandoline. Galette de douceurs désuètes, Une blonde dans la Casbah nous donne à découvrir une Biyouna abonnée aux sixties de ses premiers pas et de ses rêves encore intacts. La belle aventure cinématographique de Biyouna continue de plus belle : en 2007, elle campe un autre rôle dans Délice Paloma, le troisième film de Nadir Moknèche qui sera prochainement projeté à Alger, dans le cadre de «Alger, capitale de la culture arabe». Dans ces trois films, Biyouna parvient, et cela grâce à Nadir Moknèche, à se débarrasser de son personnage comique pour en revêtir un autre plus consistant et sérieux, voire cinématographique. «C'est grâce à Nadir Moknèche. J'adore travailler avec lui et avec lui je découvre et j'apprends beaucoup de choses. Il me dirige et j'ai appris avec lui la tragédie. Il a fait sortir en moi la tragédie et a fait en sorte que je ne sois plus ce personnage comique, une étiquette que le public me colle», ne cesse de dire Biyouna à propos de sa relation avec Nadir Moknèche.