Publication n S'il y a des éditeurs qui se veulent prudents dans leur démarche éditoriale, d'autres, en revanche, affichent une grande ambition. Là où des pays éditent par millions des titres, là où l'édition s'inscrit dans une dynamique continue et rentable, ici, en Algérie, l'édition reste occasionnelle, une aventure hasardeuse, un pari risqué en raison de l'absence d'une politique visible et pratique visant à soutenir le livre et à le socialiser, donc à créer un marché du livre stable et durable. «Éditer un livre se révèle effectivement un risque dans la mesure où le coût financier du tirage est onéreux, mais malgré cela, l'éditeur prend toujours ce risque-là», ont déclaré à l'unanimité les éditeurs, expliquant par ailleurs qu'il leur est impossible de s'aventurer dans un créneau qu'ils ignorent ou qui leur apparaît flou, fluctuant et indéterminé. «Mais le lecteur s'avère – et reste – un indicateur potentiel pour l'éditeur», ont-ils toutefois relevé. S'il y a des éditeurs qui se veulent plutôt prudents dans leur démarche éditoriale, d'autres, en revanche, y affichent une grande ambition, à l'instar de Sédia Editions qui vient d'amorcer un nouveau virage dans son action éditoriale : elle s'est lancée dans la traduction. Des auteurs algériens comme Yasmina Khadra (Les Sirènes de Bagdad, L'Attentat et Les Hirondelles de Kaboul), Malika Mokadem (Mes hommes), Nina Bouraoui (Mes Mauvaises pensées), Bouâlem Sensal (Harraga), Hamid Grine (La Dernière prière) ou encore Anouar Benmalek (L'Enfant du peuple ancien) viennent d'être traduits en langue arabe. «On ne s'est pas empêché de faire de l'arabe», a déclaré Radia Abed responsable des éditions Sédia, ajoutant : «La perspective du projet était dans la tête, sauf qu'on a pris le temps de préparer les formalités et de laisser le projet mûrir.» «L'objectif de ce travail de traduction consiste d'abord à rapatrier la littérature algérienne publiée à l'étranger, afin de la donner ensuite à lire à un prix abordable au lectorat arabophone, et, ensuite, à expatrier nos auteurs dans les pays arabes en vue de les faire connaître», a-t-elle expliqué. D'où l'association de Sédia avec les éditions El Farabi (Liban) dans son travail et de traduction et d'édition. Interrogée ensuite sur le choix d'El Farabi, Radia Abed a dit : «C'est un éditeur (Joseph Bouaâkl) que je connais. En plus, il était, il y a quelques années, un partenaire de l'Anep. C'est aussi un éditeur qui s'intéresse beaucoup à la littérature algérienne.» Radia Abed a souligné que cette entreprise qu'elle venait d'initier conjointement avec El Farabi se révèle une initiative risquée. «Là, on a vraiment pris un risque financier», a-t-elle dit, ajoutant : «Mais cela reste une bonne chose. C'est un pas qu'on a fait en avant. On a cessé d'attendre l'aide de l'Etat, de compter sur son soutien qui tarde à venir. C'est à nous de nous prendre en charge, d'amorcer des initiatives, de nous construire et de construire notre culture.»