Concert n L'association El Djazira a donné, dans la soirée de mercredi, au théâtre de verdure, un récital où l'orchestre a interprété plusieurs pièces tirées de leurs deux derniers albums. A contre-courant des constatations alarmistes de plusieurs professionnels et spécialistes du domaine, selon lesquelles elle serait en danger, Nazim Souilamas, enseignant au conservatoire d'Alger et membre actif de l'association de musique arabo-andalouse El Djazira, a estimé, lors d'une conférence de presse tenue hier au théâtre de verdure, à l'occasion de la sortie de deux nouveaux albums*, que «la musique arabo-andalouse n'est pas en déperdition». «Ce n'est pas l'impression que j'aie», a-t-il constaté. Et d'ajouter : «Bien au contraire, c'est bien parti pour la sauvegarde de ce patrimoine musical et ce, grâce au travail des associations. Il y a un public, il reste seulement à l'élargir. Il y a eu certes, dans le temps, la perte de douze noubas, mais avec ce dernier siècle, il y a un travail de conservation de ce patrimoine. » S'exprimant sur la sortie des deux albums de l'association El Djazira, Souilamas a expliqué : «Ces enregistrements s'inscrivent dans la continuité», rappelant à cet effet qu'il y avait eu précédemment trois autres albums. «Ces enregistrements sont une modeste contribution de l'association dans la préservation et la pérennisation de notre patrimoine musical», a-t-il souligné, ajoutant aussitôt : «Notre but également est de donner un autre souffle à la musique arabo-andalouse. C'est pour cette raison que nous avons tenu à faire un travail là-dessus.» Ainsi, en quête d'originalité et d'idées novatrices, l'association El Djazira a donné une couleur nouvelle et différente aux compositions que contiennent les deux albums. «Il faut savoir d'abord que nous sommes à cheval sur la tradition et tout en étant respectueux pour la ligne mélodique, on a procédé cependant à quelques changements, nous nous sommes permis quelques variations dans l'orchestration, en ajoutant aux pièces interprétées un volet différent. En fait, on a rajouté de la polyphonie dans l'instrumentation. C'est-à-dire qu'il y a eu un travail d'harmonisation.» Nazim Souilamas a, en outre, expliqué que ce travail de recomposition – ou de récréation – musicale est «un choix délibéré» visant à moderniser ce genre musical en vue d'attirer plus de public, notamment la jeune génération. «C'est pour dire que même les jeunes peuvent s'y intéresser», a-t-il dit. Et à la question de savoir s'il est possible de procéder à l'écriture d'une nouvelle composition musicale de type arabo-andalou, Nazim Souilamas a affirmé : «C'est faisable d'écrire de nouvelles pièces puisque l'écriture musicale est pareille aux autres écritures. Il suffit juste de connaître les règles. Tout donc s'écrit. Mais dans ce cas, on n'est plus dans le patrimoine. Nous sommes dans la création.» Et de préciser aussitôt : «Notre but n'est pas de créer, mais d'enregistrer le patrimoine et de participer à le sauvegarder.» * Ces deux albums ont été édités avec le concours de l'Office national des droits d'auteurs et l'établissement arts et culture de la wilaya d'Alger l L'association El Djazira a vu le jour en octobre 1993. son objectif est de faire connaître et de promouvoir la musique classique andalouse en Algérie et à l'étranger. Pour des raisons novatrices au départ, l'ensemble El Djazira s'est constitué en trio, puis en quatuor et enfin en quintette. La percussion (tar et derbouka) a été écartée pour donner libre expression à cette musique savante et fluide. C'est dans cet esprit que l'orchestre de musique de chambre est né en décembre 1998 sur une idée de Bachir Mazouni, voulant exprimer la musique andalouse par une approche nouvelle, une musicalité différente avec la collaboration de musiciens de haut niveau, tous issus d'institutions académiques universelles. Depuis sa naissance, El Djazira, qui a participé à de nombreux festivals nationaux et internationaux (Tunisie, France, Italie), s'emploie ainsi à l'effort d'universaliser ce patrimoine tout en préservant l'originalité et les repères culturels, donc identitaires de la musique andalouse.