On dit qu'Iblis ne se console pas du Paradis qu'il a perdu. Il voit dans le monde les signes des splendeurs du Seigneur avec le soleil, la lumière, l'océan, les fleurs. Mais il constate que Dieu a comblé de ses dons certaines de ses créatures, tandis que d'autres semblent participer à sa propre disgrâce et ne connaître que l'ombre et la laideur. De nature Satan est jaloux, critique et rebelle. C'est ainsi qu'il s'est élevé contre Dieu au commencement du monde parce qu'il prétendait que le Seigneur avait trop favorisé les hommes. Il a même eu l'idée, un jour, de mettre en évidence l'inégalité des sorts en convoquant une sorte de Congrès des animaux pour leur faire exposer leurs grâces et leurs disgrâces. Sans doute avait-il l'arrière-pensée de continuer à diviser le monde en créant des jalousies à l'échelon du règne animal. De toutes les contrées du globe confluèrent donc, par groupes homogènes, les délégués des grandes familles de quadrupèdes, de volatiles, de reptiles, pour répondre à l'appel lancé par Iblis. Celui-ci inaugura ce vaste rassemblement en donnant d'abord la parole aux créatures les plus spirituelles : les oiseaux. Ils se firent représenter par le plus gai d'entre eux, le moineau, qui s'avança en sautillant, à droite, à gauche, par bonds légers, jusqu'au centre de l'hémicycle : Qal ez-zaouch Kount fi bladi 'aaïch Tahat el 'arâïch ou el 'anqod ferrana. Le (joyeux) moineau avoua Ma vie passait, dans mon pays, Sous les ombrages de treillis Couverts de raisin ferrana. Et Iblis, souhaitant mettre en cause l'injustice de Dieu, donna sitôt après la parole à la huppe pour opposer le moineau, libre de se griser du nectar des plus beaux raisins dorés, à la huppe vouée à l'isolement, car son haleine fétide éloigne d'elle tant les insectes que les oiseaux ses frères : Qal et- tbib Kount fi ouatani gharib Ma çbt habib Nrselhou lidebbana. La huppe constata, (l'air farouche) : J'étais étrangère en mon pays Je n'ai pas trouvé un seul ami Pour aller me chercher une mouche. (à suivre...)