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Le tournant décisif (1re partie)
EMIGRATION DU PROPHÈTE A MEDINE
Publié dans L'Expression le 09 - 02 - 2005

Ce voyage vit la conversion de l'Arabie toute entière sous la bannière de l'islam.
L'avènement de notre glorieux prophète Mohamed Salut Divin Sur Lui, fut, sans nul doute, une bénédiction pour l'humanité entière, en contribuant puissamment par un message, d'essence divine, à la destruction du paganisme grossièrement matérialiste et en instaurant un renouveau de spiritualité dans un monde qui se trouvait tel que le nôtre, livré aux pires excès et menacé, comme le nôtre aussi, de perdre son âme.
L'Islam fut une libération pour les esprits, une direction pour les consciences, un havre de paix et de salut pour les âmes. Le messager de cette paix, de cette miséricorde, de cette prise de conscience de l'humanité en vue d'un meilleur destin, fut le prophète arabe, le prophète Mohamed, Salut Divin Sur Lui, miraculeusement illettré prédit par la Bible et l'Evangile, celui qui devait être non seulement le - Digne des louanges -, «le glorifié» (pariklytos), mais aussi tel qu'il fut appelé dans le texte grec de l'Evangile qui nous est parvenu, -le consolateur (parakletos), par l'effet, peut-être, d'un lapsus qui n'était pas si malheureux.
Ce fut en effet, l'humanité tout entière qui se voyait tirée des ténèbres vers la lumière, et point uniquement le peuple arabe qui reçut, avec l'islam, sa promotion historique. Le message de l'Islam naquit à la Mecque, cité marchande, érigée en République, qui contrôlait en ce début du haut moyen âge, la route des caravanes entre l'Océan indien et le Proche-Orient, et qui servait aussi de métropole religieuse au Hidjaz et à une bonne partie de la péninsule arabique, grâce à la présence du sanctuaire plus que millénaire de la Kaaba.
La prédication du prophète connut trois étapes : d'abord discrète, puis elle vit son cercle s'étendre lorsque le prophète reçut l'ordre de Dieu d'avertir ses proches les plus immédiats, enfin devenue publique par ces versets «Proclame hautement ce qui t'est ordonné! Détourne-toi des païens! Nous te prémunirons contre les persifleurs!» (Ste El Hijr / 94-95). C'est ainsi que se manifesta le génie du Coran dans cette progression à la fois logique, rationnelle et divine. Toute création, toute évolution n'implique-t-elle pas des phases nécessaires, naturelles, ainsi que le Coran lui- même le laisse entendre?
Ce fut ainsi que se poursuivirent publiquement, à la Mecque durant plus d'une décennie, les prédications coraniques du prophète. Les clairs et saints principes de l'Islam furent dès lors solennellement affirmés envers et contre toutes les fausses croyances, les superstitions, les barbares institutions, les usages inhumains du paganisme. Cette prédication sapait de fond en comble tout l'édifice aussi vénérable que monstrueux, à l'ombre duquel prospérait une société imbue de valeurs purement matérielles et prête à sombrer dans le brasier dévorant allumé par ses passions et ses erreurs.
Dieu est Un. Chaque âme doit répondre devant Lui dans l'Au-delà, de ses oeuvres en cette vie. L'homme doit s'abandonner en toute confiance à la toute puissance, à la bonté ineffable, infinie de Dieu; faire acte de soumission totale à Ses Volontés suprêmes. L'islam tire précisément son nom de cette soumission totale à l'Un qui est confiance, crainte révérentielle, espérance, amour infini. L'Islam enferme l'idée de paix, de salut. «Salam» car Dieu convie à son Royaume Eternel, qui est essentiellement demeure de paix, de salut.
C'est à l'un, à Dieu que l'homme doit s'adresser pour quêter Sa grâce, implorer son assistance. C'est par la seule inspiration de Dieu que l'homme se trouve être guidé dans la bonne voie, celle de son salut éternel. Guide Suprême, Dieu est aussi seul juge des actes humains, il n'est point d'intermédiaire d'intercesseur qui tienne, devant Ses arrêts souverains. Se livrer sans réserve à l'Un, sans rien associer à son autorité, seule reconnue, s'humilier devant Lui, se soumettre à sa Loi, répudier les passions violentes, chercher la paix du Seigneur : autant de valeurs, à commencer par celle de l'unicité de Dieu, de la survie nécessaire de l'homme dans l'au-delà qui ne pouvaient que soulever la fureur, déchaîner les sarcasmes de toute une caste de païens repus.
Ainsi si cette prédication ouverte fut bien accueillie d'un nombre appréciable de déshérités, esclaves ou affranchis grecs et iraniens, petites gens de toute provenance qui vinrent se grouper autour du prophète, elle eut au contraire, pour effet de susciter le scepticisme railleur puis bientôt les persécutions de la bourgeoisie opulente. Il y eut fort peu de conversions parmi les personnages de quelque notoriété, hormis celle de l'oncle du prophète Hamza (plus tard martyr de Ouhoud ) et du futur Calife Omar ibn Al khattab, qui se trouvait être l'un des adversaires les plus violents de l'islam.
Qu'en est-il de la réaction des païens?
A mesure que croissait le nombre des convertis, l'animosité des mecquois païens ira, elle-même croissant. Les maîtres battaient sans pitié leurs esclaves convertis. Des gendres du prophète se voyaient contraints de répudier leurs jeunes épouses. Bientôt, tout le clan des Hachimites, auquel appartenait le prophète, se trouvait mis au ban de toute la société mecquoise, par convention expresse qui fut contresignée par les notables Quoraïchites et affichée au temple de la Kaaba. On dut, il est vrai, atténuer les rigueurs d'un tel bannissement au bout de quelque temps. On s'était aperçu, comme le prophète l'avait annoncé du faubourg où il se trouvait exclu, que les mites avaient tout dévoré du document affiché contre lui, hormis le nom -d'Allah-qu'elles avaient respecté. Ce miracle comme tant d'autres, laissait les païens indifférents; ils mettaient tout cela sur le compte de la magie, comme le souligne éloquemment le Coran dans les versets 1 à 5 de la Sourate «la Lune-. Que voici : l'heure du Jugement approche; la lune s'est fendue en deux tronçons. S'ils voient un prodige marquant, ils s'en détournent et disent «la magie se poursuit». Ils crient à l'imposture, se complaisant dans l'erreur, mais tout s'éclairera un jour. Assez de récits leur étaient parvenus propres, à les mettre en garde. Haute sagesse en vérité. Les menaces, pourtant, n'ont servi à rien».
La Lune s'est bien fendue, se divisant en deux tronçons distincts, que l'on put voir au niveau de la crête d'Abou Qobays, l'une des montagnes dominant la Mecque. Les païens avaient demandé, par défi, l'accomplissement d'un tel prodige, qui s'opéra à l'instant sous leurs yeux. La relation de ce miracle, et de bien d'autres aussi, et rapportée par les deux grands maîtres traditionnalistes de l'Islam, à savoir boukhari et Mouslim dans leurs deux grands recueils qui font autorité. L'exégèse moderne a tort de récuser ces témoignages dignes de foi. Le Coran n'est-il pas, au surplus semé de prophéties constituant des miracles plus probant encore? Pourquoi donc jetterions-nous un voile sur d'autres miracles non moins authentiques? «Le Coran ne parle pas de voyage de l'homme dans la Lune» affirme doctement l'un de nos nouveaux exégètes. Or, le Coran a dépassé infiniment le cadre d'une randonnée Terre-_Lune. Il a évoqué en deux versets bien nets toutes les tentatives astronautiques possibles de l'Humanité, qui seront d'ailleurs vouées à un échec certain, prédit dans le second verset: «Races de génies et des humains s'il vous est donné un jour de franchir les bornes des cieux et de la terre, passez - les ! Une certaine puissance vous sera nécessaire pour les franchir.... -Les jets de feu, de l'airain fondu seront projetés contre vous : vous n'aurez pas le dessus». (Ste le tout clément - 33 et 35),
Ne voyons-nous pas plutôt la guerre des mondes dans cette brève vision grandiose de science fiction ? La traduction par notre exégète du terme arabe - soultâne -, par pouvoir émanant de Dieu, est absolument erronée. Il s'agit plus simplement du sens propre du terme arabe: puissance, maîtrise, domination -. Or, c'est la maîtrise des éléments, la puissante organisation des moyens techniques mis en jeu qui a permis cette minime escalade de la lune qui n'est qu'un petit pas dans le franchissement des bornes spatiales dont parle le Coran. De toutes façons, l'exploit de la lune a déjà été le - franchissement- de la zone d'attraction terrestre. Ainsi la randonnée lunaire a bien été prévue par le Coran, comme toutes celles qui survivront. Le paganisme des premiers temps de l'Islam comme le nôtre, baptisé du nom de progrès à tout casser de civilisation, s'avérait résolument réfractaire à toute tentative de redressement salutaire, de correction bienfaisante. Le Coran servit, dans une large mesure, surtout durant la période ingrate du début, à soutenir, affermir le prophète dans la lutte ardue, épuisante qu'il devait mener jusqu'au bout, à le consoler des déboires, des déceptions qu'il lui arrivait souvent d'essuyer au cours de ses vaines tentatives de la période mecquoise, où il s'entendait ouvertement traité d'imposteur, d'illuminé, de poète délirant, de magicien.
Vers l'année 620 de l'ère chrétienne ayant perdu coup sur coup son oncle Abou Talib et sa femme Khadidja, le prophète Mohammed Salut Divin Sur Lui se vit désormais sans soutien. Il chercha à se faire des adeptes en dehors de la Mecque. Sa tentative pour convertir les Thaquifites, habitants d'At-Taif, seconde ville importante du Hidjaz faillit tourner au drame. Ce fut alors que, profitant des solennités du grand pèlerinage annuel et s'entourant du plus grand secret, il s'adressa à des personnalités de - Yathrib-, ville située au Nord du Hidjaz, à dix jours de marche de la Mecque (la future Médine de 1'Islam) pour leur exposer les rudiments de la nouvelle religion et les inviter à y adhérer. Déjà influencés par des prédications de source juive annonçant la prochaine apparition d'un prophète en Arabie, les pèlerins médinois se convertirent sur le champ; ils firent promesse solennelle de répandre l'Islam parmi leurs frères des deux tribus soeurs, les Aws et les Khazradj. Ils donnèrent rendez-vous au prophète pour les solennités de l'année à venir.
Un grand nombre de conversions fut donc opéré entre-temps par la voie de ces premiers pionniers médinois. Les gens de yathribe- étaient tous désignés, de par les prophéties méssaniques répandues par leurs voisins juifs pour jouer la carte de l'Islam contre le paganisme, en donnant asile chez eux au nouvel élu de Dieu. L'année suivante, une importante délégation des deux tribus Aws et Khazradj vint confirmer au prophète l'engagement solennel de l'importante agglomération.
Désormais, le prophète était assuré de trouver un refuge sûr d'où il pourrait braver le paganisme et faire rayonner le culte de l'Un sur toute l'Arabie. Le destin de l'Islam allait changer de face.
Devant la réaction violente des païens, le prophète se vit contraint d'ordonner à tous les fidèles musulmans d'émigrer à Médine. Ces derniers se mirent à partir dans la discrétion, de peur d'être empêchés par Quoraîch. Les émigrés cherchaient à préserver leur foi et un lieu favorable pour adorer Dieu dont l'amour a pénétré leur chair et leur sang. Ni la séparation d'avec leur pays natal, ni l'éloignement d'avec leurs parents et leurs enfants ne leur importaient tant qu'ils agissaient, en cela pour l'amour de Dieu. Quant à Quoraîch, elle était comme atteinte de folie furieuse lorsqu'elle avait appris que les Ançars (Fidèles de Médine) avaient conclu un pacte de défense du prophète. Aussi, ses chefs et ses dirigeants se sont-ils réunis, dans la «maison du conseil» celle de Quoraîch, lieu où Quoraîch décidait des affaires importantes de la cité. Un débat houleux fut engagé et trois propositions se dégagèrent: expulser le prophète de son pays natal, le placer sous les verrous ou l'assassiner purement et simplement. L'Assemblée se rangea du coté de leur tyran, Abou Djehl qui dit-il «Nous le tuerons plutôt», et nous empêchons ses proches de tirer vengeance de son meurtre. De chaque tribu de Quoraïch, il sera choisi un jeune, bien aguerri. Ces jeunes, assemblés devant sa porte le surprendront à la sortie de chez lui et le tueront, tous, d'un seul coup d'épée ; et ainsi, la responsabilité du meurtre sera partagée entre toutes les tribus. La famille Manaf ne pourra pas, en conséquence, engager une guerre générale, et acceptera le prix du sang. Cet avis reçut l'approbation de tous. Telle a été leur machination perfide. Mais la volonté de Dieu est au-dessus de tous. Le Saint Coran relate éloquemment ces faits : «Rappelle-toi, prophète, ce complot que tramaient naguère contre toi, les mécréants pour s'emparer de ta personne, te mettre à mort ou t'expulser. Aux manoeuvres qu'ils déployaient, Dieu opposa les Siennes propres plus efficaces : il n'est plus sûres voies que celles de Dieu». (Ste le Butin / 30). Dieu a avisé son prophète des machinations ourdies à son encontre et lui a ordonné de rejoindre la ville de l'Emigration, ville où il pourra répandre l'islam, acquérir la dignité et la puissance.
Cette émigration a été un fait d'une haute sagesse, car si l'Islam s'était répandu au sein de la Mecque, ses détracteurs n'auraient pas manqué de dire : Quoraïch a cherché la domination du peuple arabe ; à cet effet, ils ont fait appel à un individu parmi eux, et lui ont demandé de jouer le rôle de prophète pour servir leur dessein. Mais au lieu de tout cela, elle s'est constituée en un ennemi mortel du prophète et n'a cessé de le persécuter jusqu'au jour où Dieu Lui a enjoint de quitter son pays.
L'Hégire, ce départ clandestin du prophète quittant la Mecque à destination de Médine, pour y prendre possession de la nouvelle citadelle de l'Islam, ne fut nullement une fuite, comme certains se plaisent à le répéter dans le but plus on moins avoué de dénigrer tant la personne que l'oeuvre de notre Prophète Mohammed, Salut Divin Sur Lui. Cette clandestinité se justifiait pleinement par le complot qu'avaient ourdi contre lui les notables quoraîchites alertés par le départ en masse vers Yathrib d'un flot d'émigrants musulmans et décidés à en finir avec l'ennemi numéro un de leurs pitoyables divinités.
Aussi est-il utile de rappeler ici dans quelles conditions providentielles s'effectua ce voyage, qui fut le point de départ de l'ère islamique, en même temps qu'il marque un tournant décisif qui vit la conversion de l'Arabie toute entière sous la bannière de l'islam.
Le prophète s'est rendu, chez son ami Abou Bakr, que Dieu agrée son âme, et l'a informé de la volonté de Dieu qui lui a enjoint d'émigrer. Abou Bakr lui demande s'il pouvait l'accompagner, «Oui» lui répond le prophète. Il lui propose alors, une de ses montures qui avaient été préparées pour ce voyage. Puis le prophète s'est séparé d'Abou Bakr en lui promettant de le retrouver, la nuit, en un endroit, en dehors de la Mecque. Or cette nuit là, c'était celle où Quoraich se préparait pour exécuter son odieux dessein. Les gens désignés se sont rassemblés autour de la porte de la maison du prophète pendant qu'il se trouvait à l'intérieur. Lorsque l'heure du rendez-vous est arrivée, le prophète demande à son cousin Ali, que Dieu agrée son âme, de se coucher dans son lit pour ne point éveiller les soupçons des ravisseurs, qui regardaient de temps à autre, à travers les interstices et vérifiaient ainsi sa présence. Puis, il recouvre Ali de son manteau et sort par devant les meurtriers en récitant un verset du Coran: «Et nous avons mis devant eux un écran et derrière eux un écran ; ainsi nous les avons enveloppés de toute part; aussi n'ont-ils rien vu». (Ste Yacine /9). Le sommeil gagne les gens aux aguets, et personne ne le vit sortir. Le prophète, Salut Divin Sur Lui, rejoint son ami. Ils se mettent tous deux en route et arrivent enfin à la caverne «Thaour», où ils se cachèrent.
L'impact sur le destin de l'Islam
Quant aux païens, lorsqu'ils ont constaté que leur complot a été déjoué, et qu'ils ont passé la nuit à surveiller Ali, fils d'Abou Talib, et non point «Mohammed, fils d'Abdou Allah», la colère s'est emparée de leurs esprits, et ils ont dépêché des émissaires dans toutes les directions, et ont promis des primes à quiconque amènerait Mohammed vivant ou dénoncerait sa cachette. Dans leur recherche, ils sont arrivés devant l'entrée de cette caverne où se cachaient les nobles fugitifs. Ils étaient si près de ceux-ci, que si l'un d'entre eux s'était mis à regarder devant ses pieds, il les aurait aperçus. L'issue de la caverne fut ensevelie par la grâce de Dieu, à l'aide d'un nid de pigeons monté aussitôt de toutes pièces et d'une toile tissée vaillamment par une famille d'araignées. La présence de ces êtres fit dérouter les chasseurs de prime de leur proie. Cependant, l'angoisse a fait couler les larmes du vertueux Abou Bakr auquel le Coran rend hommage en ces termes : «Si vous refusez votre appui au prophète, il aura toujours celui de Dieu ! C'est Dieu qui l'a déjà secouru quand, expulsé par les infidèles et se trouvant au fond de la grotte, seul à seul avec son compagnon, il se mit à lui dire, l'encourageant: «Ne t'aflige pas ! Dieu se trouve avec nous». Dieu fit descendre sur lui Sa sérénité réconfortante et l'assista de troupes invisibles. Il fit tomber au plus bas le prestige des infidèles, tandis que s'élevait bien haut le Verbe de Dieu. Dieu est Tout-Puissant, détient la Sagesse Suprême». (Ste le Repentir- 40).
Ce fut une grâce de Dieu que les païens se fussent aveuglés à ce point et qu'aucun d'eux ne fut tenté de regarder à l'intérieur de la caverne. Bien mieux, le pire ennemi du prophète Omeya fils de Khalef, s'est mis à dissuader ses compagnons de la possibilité d'une cachette dans cette caverne. Les deux fugitifs y sont demeurés trois nuits, jusqu'au moment où toute recherche a cessé.
Lorsque les recherches ont cessé, ils sont sortis de la caverne. Ils sont allés retrouver le guide qui les attendait avec les deux montures, et ont entrepris le voyage le long de la côte. En cours de route, ils ont été rejoints par un chasseur de prime Soraqua, fils de Malik de Modlidj. Ce dernier avait appris que Quoraîch avait promis une prime contre la capture du prophète et d'Abou Bakr, morts ou vifs. Soraqua saisit l'occasion qui lui est offerte, prit discrètement une monture et partit à la poursuite du prophète. Lorsqu'il s'approcha de lui, son cheval buta contre une pierre et tomba à terre. Il remonta sa cavale, reprit sa course et se trouva si près du prophète qu'il l'entendit réciter le Coran; Abou Bakr ne cessait de se retourner, mais bientôt les jambes de son cheval s'enfoncèrent dans le sable jusqu'aux genoux et lui, s'abattit alors à terre. Il aiguillonna la cavale qui se redressa. Mais sitôt qu'elle sortit ses jambes, un nuage de poussière, plein d'éclairs se dégagea de ses sabots et monta au ciel comme une fumée. Soraqua comprit alors, que ses tentatives seront peine perdue; une terreur immense s'empara de lui. Il se mit à crier : Grâce ! Grâce !
Le prophète et ses compagnons (Abou Bakr, son serviteur Ameur Ibn Fohira et leur guide ibn Arqath) firent halte et l'attendirent. Soraqua a dit plus tard : «Après avoir subi toutes ces épreuves, j'ai eu la conviction profonde, qu'un jour, la cause du prophète triomphera». Il dit au prophète: «Tes compatriotes ont promis une rançon pour ta capture» et il lui donne des précisions sur les intentions de Quoraîche. Puis il propose aux voyageurs des provisions et des effets. Ils ne prirent rien, mais ils lui dirent: «Tache de garder le silence». Soraqua demande alors au prophète de lui faire établir un sauf-conduit et celui-ci lui fut aussitôt délivré par Abou Bakr.
Ainsi s'est achevé ce drame où la Providence a démontré, une fois de plus, avec quelle sollicitude elle s'intéressait au prophète et comment elle assurait la protection du Messager de Dieu, contre le péril de ses ennemis.
Depuis que les habitants de Médine ont appris que le prophète avait quitté la Mecque pour les rejoindre, ils n'avaient cessé, chaque jour, de se rendre à «El-Harra» (terre recouverte de pierres noires d'origine volcanique) qu'ils ne quittaient qu'au moment où ils étaient chassés par la chaleur de midi. Un jour après une longue attente, ils s'en retournèrent chez eux lorsqu'un juif aperçut à travers le col de la montagne le Messager et ses compagnons émerger du mirage qui, tantôt les engloutissait et tantôt les faisait apparaître. Le juif cria du plus haut de sa voix «Peuple arabe voilà, votre bonne fortune ! (La chance que vous attendiez)». Ils se jetèrent sur leurs armes et allèrent à la rencontre du Messager à «El-Harra».
Le prophète longe le côté droit d'El-Harra, jusqu'au moment où il arrive devant les maisons de la famille Amr fils d'Aouf, à Qouba, où il mit pied à terre. Il ressort des travaux du célèbre astronome de feu Mohamed Bacha, que cet événement de l'Hégire fut le 2e jour du mois lunaire Rabia 1er qui correspond au 20 septembre 622 de l'ère chrétienne.
Ce fut le début d'une ère nouvelle pour l'Islam qui a survécu à treize années de persécutions durant lesquelles le Messager était dans l'impossibilité de prêcher ouvertement la foi en Dieu.
Le prophète séjourna à Qouba le mardi, le mercredi et le jeudi. Il y fut rejoint par son cousin et plus tard son gendre, Ali fils de Abou Talib, qui après avoir remis entre les mains de leurs propriétaires tous les dépôts à lui confier, arriva, ayant marché de jour et de nuit, les talons sillonnés par de larges crevasses. Le prophète Salut Divin Sur Lui, l'embrassa avec effusion, le pansa de ses mains bénies et l'installa à ses côtés dans la maison de Keltoum.
Le prophète s'occupa aussi à poser les fondations d'une Mosquée - la première de l'islam - et laissa le soin de l'achever à Amar fils de Yasser. Cette Mosquée reçut le nom de «At-Taqwa» c'est-à-dire la Mosquée de «la crainte de Dieu», c'est d'elle qu'il est question dans ces versets: «Il en est qui ont édifié une mosquée, agissant par haine et impiété, et se proposant d'en faire un tison de discorde entre les fidèles. Ne l'offraient-ils pas en repaire à ceux qui naguère, avaient combattu Dieu et son prophète? Ils protesteront avec force de leurs bonnes intentions. Mais Dieu est témoin qu'ils mentent effrontément. Prends garde de prier en ce lieu maudit! Car il est un autre édifice assis dès le premier jour sur la piété, et autrement plus digne pour que tu y célèbres l'office. C'est là que se rendent ceux qui mettent la pureté par-dessus tout. Ceux qui recherchent la pureté sont toujours aimés par Dieu». (Ste le Repentir / 107-108). Le Saint Coran ne cesse d'éveiller la conscience des fidèles musulmans et de les prévenir contre les rivalités de leurs ennemis. En effet, le verset 107 sus-visé fait état d'une mosquée rivale construite par certains hypocrites lors de l'absence du prophète, occupé dans la bataille de Tabouk, dans l'Arabie de l'Extrême Nord qu'il dirigeait en l'an 9 H contre le territoire byzantin où l'on avait assassiné un ambassadeur musulman. Au retour, le prophète ordonna d'incendier cette mosquée rivale qui fut construite seulement dans le but de semer haine et doute dans les esprits des musulmans, et se réserver ainsi une zone d'influence.
La longueur de l'édifice mesurait cent coudées, et sa largeur était un peu moindre. Trois portes y donnaient accès, et la principale fut désignée sous le nom de «bab-ar-Rahma» ou porte de la Miséricorde.
Le -Minbar-, ou chaire, était formé d'un simple tronçon de palmier, sur lequel montait le prophète pour prêcher. On voit combien cette première Mosquée, analogue è celles des plus pauvres villages sahariens, était loin de ressembler aux merveilleux édifices qui devaient bientôt être élevés pour le culte de l'islam.


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